Pour les articles homonymes, voir Canon (Bible) (homonymie).
Le
canon désigne dans toutes les religions l'ensemble des textes considérés comme sacrés et régissant le
Culte : voir
Canon (religion).
Étymologie
Le mot
canon, qui vient du
Grec ancien κανών (
kanôn), lui-même d'origine sémitique :
Hébreu qaneh (roseau, mesure, canne),
Akkadien quanu,
Ougaritique qn, le punique
qn' ) et peut-être même
Sumérien gin.
Au
IIe siècle, le mot passe dans le milieu
chrétien et désigne :
- Kanon the aletheia : le canon de la vérité,
- Kanon the ekklesia, la règle de l'assemblée, c'est-à-dire les règles de conduite, en fait de Gouvernement, propre à chaque église (communautés chétiennes locales).
Au
IVe siècle, le sens de ce mot est mis en rapport avec la
Bible. Il s'agit alors des livres de l'
Ancien Testament et du
Nouveau Testament qui sont deux expressions nouvelles signalées :
- En 363, au concile de Laodicée dans le canon 59 (concile régional)
- En 392, dans la lettre Festale d'Athanase d'Alexandrie.
Canon de la Bible hébraïque
L'idée d'un canon de la Bible hébraïque (nommée «
Ancien Testament » par
Justin de Naplouse) ne s'impose qu'après le
Synode de Jamnia (ou Yabnah ou Yabneh), c'est-à-dire à la fin du
Ier siècle, après la destruction du Second Temple par les romains. Auparavant, le concept d'une liste close (au sens de complète et définitive) des livres repris dans la
Septante est inconcevable. En revanche, les processus de canonisation semble avoir été un processus ouvert.
Le Texte massorétique actuel est contemporain de l'écriture de la Mishna, c'est-à-dire le fruit du travail des docteurs du IIe siècle. Ce travail de grammairiens (la vocalisation enregistre diverses prononciations possibles) se poursuit jusqu'au Xe siècle ; le manuscrit de Saint-Petersbourg (Codex Leningradensis, coté B19A) qui date du XIe siècle (copié au Caire en 1008-1009, d'après le colophon) et qui sert de base aux bibles d'étude en hébreu (comme la BHS - Biblia Hebraica Stuttgartensia - éditée par Rudolf Kittel), est un témoin de ce travail. Jusqu'au Ier siècle, la Bible de tous est le texte grec de la Septante, quoique des éditions en Hébreu différentes du texte proto-massorétique aient existé, comme le montrent les rouleaux de Qumran.
Hypothèse du canon de Jamnia
Dans les
Antiquités juives,
Flavius Josèphe donne une liste de 22 livres composant le
canon des écritures juives. Elle comprend :
Après Jamnia, le milieu rabbinique tannaïte, le milieu qui rédige la Mishna, se vit comme l'héritier naturel de toutes les traditions antérieures, qu'elles soient saducéennes, ésseniennes ou, bien évidemment, pharisiennes. Toutefois, pour le milieu de Gamaliel II, l'attitude apocalyptique des « membres du Mouvement de Jésus » selon l'expression de Jacques Schlosser (professeur à l'Institut catholique de Lyon), en fait un danger pour les relations avec l'occupant romain. En outre, ce sont des minim (sectaires), en celà qu'ils concentrent l'accès à l'alliance sur le Baptême. De ce point de vue, ils se désintéressent de l'ensemble du peuple. De facto, ils sont une secte réformatrice et diviseuse comme l'étaient les Ésseniens.
En outre, ils « font dire » des choses de plus en plus étranges à la Septante. Les controverses rabbiniques, enregistrées dans le Talmud montrent des discussions qui, sous prétexte d'exégèse imaginative, présentent des opinions sur la pertinence de tel ou tel texte (Traité Meguila, Traité Soferim). On assiste donc à un retour à l'hébreu, à une méfiance envers les textes grecs qui ne s'apaisera qu'au début du IIIe siècle.
Les témoins de cette élaboration sont nombreux. Par exemple :
- Dans la Septante, Samuel est désigné comme « Nazir perpétuel depuis le sein de sa mère » tandis que le texte massorétique utilisé de nos jours lui dénie cette qualité (dans le texte massorétique, le seul "Nazir depuis lesein de sa mère" est Samson (cf. Juges 13.5). L'interprétation traditionnelle dit que la Septante s'éloigne du texte hébreu originel. Pourtant, une discussion dans le traité Nazir s'inquiète du nazirat de Samuel. On peut donc penser que le texte de la Septante était peu différent de l'un ou l'autre des textes hébraïques alors usuellement en circulation et que l'élaboration tannaïte fut créative, en premier lieu pour éliminer tout aspect apocalyptique ou messianique, c'est-à-dire révolutionnaire.
- Une autre discussion talmudique montre le déclassement d'un texte rédigé en Araméen. Il correspond à la période de méfiance envers les textes traduits du syriaque, qui est un araméen oriental. Au traité Meguila , Jonathan b. Uzziel déclasse le livre de Daniel de Prophète (nebiim) en écrit (ketoubim) alors que Flavius Josèphe et la Septante le tenaient pour Prophète.
La rédaction concomitante de la Mishna et des Évangiles révèle des polémiques sous-jacentes. Ce sont des rédactions concurrentes. Ces polémiques jouent un rôle non négligeable tant dans l'évolution de la pensée rabbinique autour de Gamaliel II que dans l'accouchement du système chrétien.
(Voir l'article spécialisé Abraham Joshua Hershel)
Hypothèse de Sundberg (1964)
A partir d'un consensus établi autour d'une canonisation en 3 phases :
- une première phase vers 400 avant l'ère commune concernant le Pentateuque
- une deuxième phase vers 200 avant l'ère commune concernant les Prophètes
- une troisième phase vers 90 avant l'ère commune concernant les Ecrits. Cette dernière canonisation étant ratifiée au premier siècle par l'usage commun.
Albert C. Sundberg, Jr envisage, à partir de 1964, une hypothèse plus complexe
Hypothèse de Thackeray (1921)
Henri St. John Thackeray est un grammairien. Il a travaillé essentiellement sur la Septante, c'est-à-dire sur la Bible en grec. En 1921, il publie "The Septuagint and Jewish worship;: A study in origins, (The Schweich lectures of the British Academy)"
Hypothèse de Leman Beckwith
- Leman Beckwith : The Old Testament of the Early Church, Harvard theological Studies, n° 20
Construction du Canon du Nouveau Testament
Deux thèses successives sont actuellement en voie de synthèse.
thèse de Adolph von Harnack et Hans Freiherr Von Campenhausen
- pour Hans Freiherr Von Campenhausen voir La Formation de la Bible chrétienne
- Adolph von Harnack son livre : Origin of the New Testament
Vers
200 émerge l'idée d'un catalogue des livres composant le Nouveau Testament. Font alors autorité :
- 4 évangiles
- 13 lettres de Paul
- les actes
- la première lettre de Jean
- la première lettre de Pierre
Outre les indices du cheminement dans la lente constitution du corpus, indiqué dans l'article Evangile, des témoins plus concrets sont donnés dans :
L'influence de
Marcion fut déterminante dans la constitution d'un canon.
Thèse de Albert C. Steinberg
(lire :
The Old Testament of the Early Church Harvard Theological Studies n°20)
Selon cet ouvrage, il n'y eut jamais de Canon Alexandrin de la Septante, ce que confirment les études sur la construction du Talmud, telles qu'évoquées ci-dessus.
L'opportunité d'une liste close n'interroge les chrétiens qu'à partir de la toute fin du IVe siècle. Elle n'intéresse réellement que les occidentaux. Le canon de l'Ancien Testament, celui des églises latines comme celui des églises grecques, évoluent parallèlement. Jusqu'au IVe siècle, on parle de canon ouvert et postérieurement de canon fermé.
Toutefois Steinberg date le fragment de Muratori du IVe siècle et lui donne une origine orientale. Ces caractéristiques en font une liste parmi toutes les autres et lui retirent son statut de liste inaugurale. Cette conception élimine le long débat entre les églises et attribue la fermeture du canon à une autorité ecclésiastique.
Le contenu du fragment ruine cette hypothèse sur la construction du Nouveau Testament. Le Fragment ne dit mot de l'Epitre aux Hébreux fort appréciée dans les églises orientales parce que faussement attribuée à Paul de Tarse.
Naissance d'une tradition écrite en Orient
Jusqu'au
Ier siècle, la
Bible de tous est la
Septante, quoique des éditions en
Hébreu différentes du texte proto-massorétique aient existé, comme le montrent les rouleaux de
Qumran. C'est elle qui donnera l'
Ancien Testament des
chrétiens. Le
Texte massorétique actuel est contemporain de l'écriture de la
Mishna, c'est-à-dire le fruit du travail des docteurs du
IIe siècle quoiqu'un texte proto-massorétique soit connu des 150 avant l'ère commune.
Ce travail de grammairiens (la vocalisation enregistre diverses prononciations possibles) se poursuit jusqu'au Xe siècle ; le manuscrit de Saint-Petersbourg (Codex Leningradensis) qui date du Xe siècle et sert de base aux bibles d'étude en Hébreu, est un témoin de ce travail.
Après le Synode de Jamnia, le milieu rabbinique tannaïte qui a rédigé la Mishna, se vit comme l'héritier naturel de toutes les traditions antérieures, qu'elles soient saducéennes, esséniennes ou, bien évidemment, pharisiennes. Pour le milieu de Gamaliel II, les chrétiens apparaissent comme des sectaires et des hérétiques. Leur interprétation de la Septante est mise en cause. On assiste donc à une méfiance envers les textes grecs et à un retour à l'Hébreu. La rédaction concomitante de la Mishna et des Évangiles révèle donc des polémiques sous-jacentes qui ont joué un rôle non négligeable tant dans l'évolution de la pensée rabbinique autour de Gamaliel II que dans l'accouchement du système chrétien.
Les tentatives de Tatien, de Marcion face l'opposition d'Irénée et au dogmatisme d'Athanase sont clairement à l'origine du Canon
Le canon de Marcion (vers 150)
Il précède le canon officiel. Il ne garde des écrits qui circulent :
- Les épîtres de Paul, dont il n'en connaît que 10 sur 13 du canon officiel postérieur,
- Une version expurgée de l'évangile selon Luc que Marcion tient pour un compagnon de Paul.
Les lettres de Paul connues par Marcion sont les suivantes :
- Galates,
- 1 et 2 Corinthiens
- Romains,
- 1 et 2 Thessaloniciens
- Ephésiens que Marcion nomme "Laodicéens"
- Colossiens
- Philippe
- Philémon.
Ce corpus éditorial a perduré dans l'église syriaque, avec en outre
l'Epître aux Hébreux que quelques auteurs modernes attribuent à
Marcion tandis que les anciens l'attribuaient à Paul.
Le Diatessaron de Tatien
Troublé par le fait qu'on retienne 4 évangiles présentant 4 témoignages différents sur
les dits et les faits de Jésus,
Tatien entreprend de les fondre en un seul récit continu et cohérent, ne retenant que ce qui leur est commun, gommant par cette sélection tout ce qui est divergent qu'il considère comme dépourvu de sens autre qu'anecdotique. Il s'inspire des 4 évangiles, canonisés depuis. La liberté avec laquelle il les utilise, semblable à celle dont usèrent les auteurs de
selon Luc et
selon Matthieu dans leur reprise de
selon Marc montre qu'à l'instant où il écrit, les 4
grands évangiles ne sont pas encore sacralisés. Les emprunts qu'il fait à d'autres sources montrent qu'ils n'ont pas vocation à être une source exclusive. Dans un temps où triomphe l'idée de
Plotin que la
Vérité est une et que le
dissensus est haïssable, on ne peut concevoir que chacun des évangiles réputés canoniques avait vocation à se suffire à lui-même et non à compléter les autres.
Chacun d'eux, du point de vue de leurs auteurs, se proposait de devenir le seul témoignage valide de la vie et de l'enseignement de Jésus qui supplanterait tous les autres. D'ailleurs, l'intention polémique est clairement marquée dans l'incipit de
l'auteur à Théophile. Plusieurs compilations harmonisantes ont été produites. Celle de Tatien perdurera dans le corpus canonique de l'église syriaque.
Canonisation des 4 évangiles
Pourquoi ces 4 là et pas les autres ? Cette question vient immédiatement à l'esprit d'un lecteur du XXI
e siècle. Elle intéressait aussi les lecteurs de l'Antiquité tardive et la réponse donnée par
Irénée de Lyon dans son
Apud Haereses ne manquera pas d'étonner le lecteur contemporain :
il ne peut y avoir ni un plus grand ni un plus petit nombre d'évangiles. En effet, il y a 4 régions du monde dans lequel nous sommes et 4 vents principaux
Irénée situe sa réflexion dans
l'oikoumene d'
AnaximandreSi l'
Amérique et l'
Océanie avaient été connues au temps d'Irénée, les Anciens auraient canonisé deux évangiles de plus, ce qui eut été conforme à la cosmologie du temps ; le monde intérieur devait refléter la structure du monde extérieur.
Coexistence d'une tradition orale
L'étude des
Pères de l'église et le recueil des citations qu'ils donnent dans les écrits du
IIe siècle et
IIIe siècle montrent que les
paroles attribuées à Jésus ne proviennent pas des évangiles tels qu'ils nous sont connus. La
première hypothèse est qu'ils citent de mémoire et que celle-ci n'est pas tout à fait précise. La comparaison avec les citations de l'
Ancien Testament montre moins de divergences avec les textes de la
Septante. Devrait-on supposer que leur mémoire est moins fidèle pour les
dits de Jésus que pour les textes de la Septante ? Pourtant, les hommes de l'antiquité étaient surentraînés pour de longues récitations. On formule donc
une autre hypothèse. D'autres évangiles ont été écrits qui transmettent d'autres traditions sur
les dits et les faits de Jésus. Ils mettent à profit la même
Tradition orale et servent de référence dans les textes des Pères anciens. Des ouvrages comme :
- L'évangile de Thomas
- L'évangile de Pierre
- Le dialogue du Sauveur
conservent des traditions sur
Jésus qui ne doivent rien aux évangiles canoniques. Quelques-uns de ces textes périphériques sont couramment utilisés qui n'ont pas été conservés par la canonisation. Ainsi,
Papias, évêque de
Hiérapolis qui n'est connu que par
l'Histoire ecclésiastique d'
Eusèbe de Césarée, connaît des récits similaires à ceux rapportés dans l'évangile "selon Marc" et des éléments de récits qu'on retrouvera dans l'évangile "selon Matthieu". Ces quelques indications sur les connaissances des premiers pères suffisent à invalider la théorie d'
Augustin d'Hippone sur la chronologie des évangiles, telle que rapportée pour mémoire dans l'article le
Problème synoptique. Papias a écrit des
Explications sur les paroles du Seigneur, perdues depuis, à l'exception de la citation de la Préface qu'en fait Eusèbe. Ces explications portent sur les récits oraux qu'il a reçus.
Article détaillé : .Sur le concept d'hérésie
Selon qu'on se situe au
IIe siècle, au
IIIe siècle, au
IVe siècle, les
hérésies ne sont pas les mêmes. Il en résulte que les livres rejetés ne sont pas les mêmes. À l'exception des
hérésies" donatiste, mélécienne et novartienne, qui traitent des désaccords sur la conduite à tenir face aux apostats et autres Relaps et posent la question du pardon
, les hérésies sont majoritairement régionales et régionalement traitées jusqu'au concile de Nicée de 325. On comprend donc qu'une liste d'hérésies qui varie avec la géographie (région) et l'histoire (le temps) conduit à des exclusions/inclusions qui relèvent de temps à autres du règlement de compte. Jusqu'au concile de Chalcédoine, tel qui est excommunié à Rome peut être relevé à
Antioche ou ailleurs et réciproquement. Deux exemples :
- Marcion qui porte à Rome vers 140-150 ses 10 lettres de Paul de Tarse en repart excommunié, fonde son église et son corpus est retenu comme base par l'église Syriaque
- Athanase d'Alexandrie, excommunié dans son Patriarcat d'origine est relevé et accueilli à Rome jusqu'à ce que l'empereur fasse statuer en concile qu'il n'est plus possible à un évêque de relever l'excommunication d'un autre de ses collègues. En dépit de quoi, les évêques de Nicomédie, d'Antioche, de Césarée continueront d'accueillir et de réintégrer les excommuniés d'Alexandrie ou de Rome.
Conclusion d'étape
Tatien et Marcion, par le choix de leurs sources et leur entreprise de réécriture témoignent de la résistance à accepter plusieurs témoignages divergents. Le rôle de Marcion fut décisif, ne serait-ce que dans
l'idée de clore une liste pour la dresser contre les autres sources, d'un corpus s'opposant à d'autres corpus disponibles. L'église de Marcion, discréditée sous le nom de
marcionitisme, subsistera plusieurs siècles en
Asie Mineure. Pour lutter contre celle-ci, les patriarcats orientaux et occidentaux utiliseront la méthode qu'elle avait inaugurée : dresser une liste où la distinction de certains livres élevés au statut
d'écriture inspirée renvoie les autres sources au rang de
fabulae, c'est-à-dire d'
apocryphes.
Canon d'Orient, canon d'Occident
Critères
Selon qu'elles viennent d'
Orient et d'
Occident, les listes de livres retenus ne sont pas les mêmes. Outre les réticences à la réception plurielle d'un témoignage
tétramorphe (néologisme d'Irénée!), certains livres reçus en Occident sont répudiés en Orient et réciproquement. Les églises orientales fonctionneront longtemps avec un
canon de 22 livres tandis que les églises d'Occident tiendront pour un
canon de 27 livres. Orientaux comme Occidentaux utilisent cependant les mêmes critères :
- Sont indiscutables les livres qui sont reçus par le plus grand nombre
- Suit une deuxième collection de livres qui semblent bons mais dont on se demande s'ils le sont assez pour être lus en public durant les liturgies.
- La troisième liste rassemble les livres écrits par des hérétiques et, pour cela doivent être rejetés (voire détruits)
Ce classement appelle quelques remarques.
Sur la deuxième liste
Elle comporte généralement des textes dont la critique textuelle contemporaine montre qu'ils sont de rédaction contemporaine ou quasi-contemporaine de ceux qui se chargent d'établir les listes. Quoique la canonisation d'un texte contemporain ne soit pas interdite, comme le montre celle du
Diatessaron de Tatien dans l'église syriaque, il semble que l'ancienneté attribuée aux textes soit un sésame. Cette deuxième liste comporte aussi des livres
nés de père inconnu mais reçus partout. Au bout de longues tractations, certains seront inclus dans le canon. D'autres, d'usage liturgique dans certaines communautés, seront rejetés. On n'a aucune idée de ce que signifie
pseudépigraphie. Pseudépigraphe est le mot utilisé par les protestants pour designer les livres de l'Ancien Testament que les catholiques nomment "Apocryphes".
Les livres toujours retenus
La première liste comprend partout :
- Les 4 évangiles
- Les actes
- La première épître de Jean
En ce qui concerne les épîtres, les listes varient. Marcion en connaissait 10, les autres listes en donnent 13, voire 14. Certaines listes furent construites autour de la symbolique du nombre 7 au prix d'acrobatie : les lettres doubles comptant pour une seule.
- article spécialisé : Paul de Tarse
- Les livres suivants furent toujours retardés:
- Les épîtres dites catholiques, non parce qu'elles appartiennent en propre à une dénomination (comme on aurait tendance à le croire aujourd'hui) mais parce qu'elles sont adressées à toutes les églises au lieu d'être adressées à l'une d'elles, une métropole, en particulier comme le cas est constant chez Paul et dont elles imitent le genre littéraire.
Article détaillé : .Ce sont :
- Jude
- 2 et 3 Jean
- Jacques
- 2 Pierre
Quelques textes sont systématiquement ignorés en occident qui sont appréciés en Orient et réciproquement :
- L'épître aux Hébreux, reçue en Orient,
- L'Apocalypse (Révélation) de Jean, reçue en Occident, rejetée en Orient du fait de la proximité de la tradition tannaïte. Mise en cause par Athanase d'Alexandrie, elle sera intégrée au canon au IVe siècle
- L'épître à Philémon est ignorée de l'église syriaque qui connaît en revanche une 3e épître aux Corinthiens.
Clôture du canon
Article détaillé : . Dans les Églises latines
Le canon se clôt à 27 livres par autorité d'Église. De ce fait, il se ferme plus tôt qu'en Orient aux synodes régionaux de
Carthage de
397 et de
419. Jusqu'aux dernières années du
IVe siècle, il exclut l'épître aux Hébreux. Cette question n'est jamais traitée dans les conciles
oecuméniques de la fin du siècle. Cette lacune assigne donc ces conciles au rôle de tribunal et au lieu d'espace où traiter des affaires des Églises dans un projet d'unification. En dépit des décrets de Gélase, les littératures apocalyptiques autres que celle de Jean seront recopiées et tenues pour partie prenante du
Nouveau Testament jusqu'au milieu du Moyen Âge (
XIIIe siècle)
Dans les Églises grecques
C'est l'usage des livres dans les communautés qui détermine le canon. Le canon démarre à 22 livres, sans épître aux Hébreux, sans lettres de Jaques, ni 2 Pierre, ni 3 Jean non plus que Jude. Au milieu du
IIIe siècle, l'oeuvre de
Cyprien de Carthage ne cite aucun de ces 5 livres non plus que la lettre à Philémon et, bien évidemment sans Apocalypse.
Cette opposition aux littératures apocalyptiques s'inscrit dans la lutte contre le Millénarisme montaniste, attestée par Eusèbe de Césarée, puis par Grégoire de Naziance, Amphiloque d'Iconium (mort en 896) qui déclare à propos de l'Apocalypse :
Certains l'acceptent mais la plupart le disent inauthentique
L'école d'Antioche, avec
Jean Chrysostome (
347-
407), Théodore de Mopsueste (
393-
466) s'en tient à un canon de 22 livres sans Apocalypse. Le concile
In Trullo (
692) ne règle rien.
Ambiguité de la cloture
Dans sa lettre Festale, Athanase recommande des livres non canoniques pour l'instruction des débutants qui sont, aujourd'hui considérés comme
apocryphes :
- Le pasteur d'Hermas
- La Doctrine des apôtres (aujourd'hui perdue)
Il recommande aussi des
Apocryphes de l'Ancien Testament inclus aujourd'hui parmi les
deutérocanoniques :
- La sagesse de Salomon (Connue en son temps comme sagesse des amis de Salomon et en son honneur)
- Le passage de livres sans père à livres absurdes et impies s'opère lentement au cours de débats et s'exprime sous cette forme chez Eusèbe. En quelque sorte, la qualité d'hérétique remonte depuis les hommes jusque vers les livres pseudépigraphes. Cette appréciation est savoureuse à posteriori quand l'Exégèse a montré depuis le XIXe siècle que même les 4 évangiles réputés canoniques sont eux-mêmes des pseudépigraphes.
- articles spécialisés : Apocryphe, Manuscrits de la Bible
Dans cette critique d'Athanase s'enracine la meilleure hypothèse actuelle concernant les manuscrits coptes de
Nag Hammadi ; on peut penser qu'ils furent enterrés parce qu'une partie d'entre eux faisaient partie des livres condamnés.
Écrits mentionnés dans la Bible mais qui ne s'y trouvent pas
- le Livre de l'alliance] (Ex 24:7)
- les Guerres de l'Éternel (No 21:14)
- le Livre du Juste (Jos 10:13 ; 2 S 1:18)
- le Livre des actes de Salomon (1 R 11:41)
- le Livre de Samuel le voyant (1 Ch 29:29)
- le Livre de Nathan le prophète (1 Ch 29:29 ; 2 Ch 9:29)
- le Livre de Gad le prophète (1 Ch 29:29)
- la Prophétie d'Achija de Silo (2 Ch 9:29)
- les Révélations de Jéedo le prophète (2 Ch 9:29)
- le Livre de Schemaeja le prophète (2 Ch 12:15)
- le Livre d'Iddo le prophète (2 Ch 12:15 ; 13:22)
- les Mémoires de Jéhu (2 Ch: 20:34)
- le Livre de Hozaï (2 Ch 33:19)
- les prophéties d'Hénoch/Hénoc (Jud v. 14)
- une épître aux Corinthiens (1 Co 5:9)
- une épître aux Éphésiens (Ép 3:3,4)
- une épître aux Laodicéens(Col 4:16)
notes et références
Articles connexes
Voir aussi
Liens externes
Bibliographie
- Introduction au Nouveau Testament : Son histoire, son écriture, sa théologie, sous la direction de Daniel Marguerat, Labor & Fides, 2000, ISBN : 2830911490
- Introduction à l'Ancien Testament sous la direction de Thomas Römer, Labor & Fides, 2004
- Dictionnaire encyclopédique de la Bible, article Canon, Brépols, 2002.
- Marie-Françoise Baslez, Bible et histoire, Folio histoire, Gallimard, 1998
- Aux sources du Canon, le témoignage d'Irénée, Yves-Marie Blanchard, avec le concours de l'Institut catholique de Paris, juin 1993
- Wilfrid Harrington, Nouvelle introduction à la Bible, Seuil, 1970.
- Étienne Nodet et Justin Taylor, Essai sur les origines du christianisme, Cerf.
- Marcel Simon, La Civilisation de l’Antiquité et le christianisme, Arthaud, 1972.
- Odon Vallet, Une nouvelle histoire des religions, Seuil.