Charles Jones Soong,
Charles Song ou
Song Jiashu (
宋嘉樹 pinyin: Sòng Jiāshù) (1863/1866 – 3 mai
1918),
Prénom social Yaoru (
耀如), missionnaire
méthodiste puis riche entrepreneur, fut partisan et ami de
Sun Yat-sen, ainsi que membre et mécène de l’
Alliance révolutionnaire. Ses trois filles,
Song Ailing,
Song Qingling et
Song Meiling épousèrent respectivement
Kong Xiangxi, Sun Yat-sen et
Tchang Kaï-chek. Les deux dernières jouèrent un rôle politique important aux côtés de leur mari puis après leur mort. Ses fils occupèrent des positions dans le
Kuomintang, le plus influent étant Song Ziwen.
Il est aussi appelé Charly ou Charlie, et transcrivit dans les premiers temps son nom de famille Soon.
Jeunesse
Né Han Jiaozhun (
韓教準),
Hakka de condition modeste de l’île de
Hainan , il est envoyé vers 12 ans à
Boston où est adopté par un oncle sans descendance qui tient un commerce de thé et de soieries ; c’est alors qu’il change son nom en Song Jiashu. Après sa rencontre avec deux boursiers du gouvernement chinois, Niu Shangzhou (
牛尚周) et Wen Bingzhong (
溫秉忠), il souhaite lui aussi étudier, mais son oncle n’approuve pas ce projet qu’il considère inutile pour son commerce. Il fugue alors et devient en
1878-
79 mousse sur un garde-côte dont le capitaine, M. Gabrielson, est méthodiste. En
1880, lors d’une escale à Wilmington,
Caroline du Nord, il est baptisé à l’église méthodiste de la cinquième rue. Le
Wilmington Star, journal local, rapporte cet événement exceptionnel pour la région qu’est le baptême d’un 'Céleste', selon les termes du journaliste.
Devant son désir de devenir missionnaire, la congrégation de Wilmington lui trouve un parrain en la personne de l’industriel du tabac Julian S. Carr (1845-1924), surnommé “Général”, principal mécène du Trinity College qui deviendra l’Université Duke. Il supportera les frais de son éducation et ils resteront toujours en contact, même après le retour de Charles en Chine. Le jeune Chinois est de 1880 à 1881 le premier élève étranger du Trinity College. Il passe ensuite à l’Université Vanderbilt où il reçoit son diplôme de théologie en 1885.
Missionnaire et entrepreneur
Officiellement missionnaire, il repart pour la Chine en
1886 et commence ses activités à
Shanghai et dans la zone rurale de
Kunshan sous la supervision de Young J. Allen. Il épouse en
1887 Ni Guizhen (Ni Kwei-tseng ;
倪桂珍1869-1931), fille du missionnaire Ni Yunshan (
倪韞山). Ils auront six enfants, trois filles (prénoms en -
ling) et trois fils (prénoms en
Zi-). Ce sont, du plus âgé au plus jeune :
- Song Ailing (宋靄齡) 1890-1973, aussi prénommée Nancy en l’honneur de la femme de Julian Carr ; elle épousera Kong Xiangxi, le plus riche banquier de Chine, futur ministre des Finances, Premier ministre de la République de Chine et gouverneur de la Banque centrale de Chine.
- Song Qingling (宋慶齡) 1893-1981, aussi prénommée Rosamond en l’honneur de la fille du pasteur de Wilmington ; elle épousera Sun Yat-sen et liera son destin à celui de la Chine communiste.
- Song Ziwen (宋子文) 1894-1971, homme d’affaires et cadre du Kuomintang ;
- Song Meiling (宋美齡) 1897-2003, qui épousera Tchang Kaï-chek et sera une personnalité importante de la République de Chine.
- Song Ziliang (宋子良) 1899-1987, homme d’affaires aux États-Unis ;
- Song Zi'an (宋子安) 1905-1969, directeur des banques de Canton et Hong Kong ;
Charles Soong a peu de considération pour le système éducatif chinois et souhaite que sa progéniture reçoive comme lui une éducation américaine. Ses enfants fréquentent à Shanghai des écoles anglophones, puis partent poursuivre leur formation aux États-Unis. Les langues en usage dans la famille sont l’anglais et le shanghaien, Charles étant le seul à connaître le Cantonais et son dialecte d’origine de Hainan. Avec Sun Yat-sen, il communiquera en anglais et en cantonais.
À 26 ans, il abandonne son poste de missionnaire et se lance dans le commerce des cigarettes et du coton. Il travaille aussi comme traducteur pour la Minoterie Fou Foong (Fufeng mianfenchang 福豐麵粉廠), alors la plus importante d’Asie. Mais c’est avec la fondation de l’imprimerie Meihua (Meihua yinshuguan 美華印書館), dont la première production est la Bible, que vient la fortune. Montée avec l’aide financière de J. Carr, elle imprime rapidement diverses publications.
Engagement politique
Charles Soong est persuadé de la nécessité de profondes réformes en Chine. En
1892, alors qu’il se trouve à
Guangzhou pour l’ouverture d’une YMCA, il rencontre Lu Haodong (
陸皓東) qui le présente à Sun Yat-sen. Il s’intéresse à son projet politique. Ils entament une collaboration et une amitié de longue durée en
1894, lorsque le ministre Li Hongzhang (
李鴻章), l'un des promoteurs du mouvement de réforme Yangwu (
洋務運動), refuse de lire la lettre que Sun Yat-sen est venu lui présenter. Charles Soong, dont les presses impriment le journal
Wanwugongbao (
萬國公報), prend alors l’initiative d’y insérer le texte de Sun. Il fera par la suite imprimer clandestinement de la propagande anti-
mandchou. En 1905, il devient membre de l’
Alliance révolutionnaire, à qui il fera don de plus de 20 000 dollars américains. Néanmoins, jusque 1912 son implication restera plus ou moins secrète, ce qui lui permettra de poursuivre son aide aux révolutionnaires sans être inquiété. Sa fille aînée Ailing devient en 1910 ou 1911 - peu après son retour des États-Unis - secrétaire de Sun Yat-sen ; il vient lui-même aider au secrétariat quand ses problèmes de santé ne lui permettent pas de se déplacer pour affaires. En 1912, il est au premier rang avec sa famille lors de l’investiture de Sun Yat-sen comme président provisoire de la République chinoise.
En 1913, après l’échec de la rébellion contre Yuan Shikai, il suit avec Ailing les révolutionnaires au Japon, s’installant à Yokohama. Cette même année, Ailing se fiance à Kong Xiangxi, qui gravite dans l’orbite de Sun, et Qingling la remplace. Sun et elle convolent bientôt. Plusieurs versions existent concernant les circonstances du mariage des deux cadettes avec Sun Yat-sen et Tchang Kaï-shek. Selon Song Qingling et Song Meiling, il s’agit d’histoires d’amour contrariées au début par l’opposition de leurs parents, du fait de la différence d’âge et du statut matrimonial ambigu des prétendants. Pour certains historiens, les mariages des soeurs Song sont des alliances d’intérêt entre trois des Quatre grandes familles (四大家族) dominant le jeune Kuomintang, nouées d’un commun accord par les différentes parties. Selon la biographie de Chen Jieru, troisième femme du généralissime Tchang, son mariage avec Song Meiling fut imposé par la Song Ailing et son mari Kong Xiangxi contre une aide au financement de l’Expédition du Nord.
Charles Soong meurt en 1918 d’un cancer de l’estomac dans sa villa de Qingdao. Il repose avec sa femme et sa fille Qingling dans un carré du cimetière de Wanguogong (萬國公墓) à Shanghai. La sépulture, construite en 1932 à la mort de sa femme, fut vandalisée durant la révolution culturelle.
Dynastie Song
Sa famille prospèrera grâce à la politique et à la finance. Hormis Qingling, seule à avoir hérité un certain idéalisme de son père, les enfants Song alliés aux familles Kong et Jiang seront critiqués pour avoir grandement contribué à la corruption du gouvernement nationaliste. Néanmoins, Charles et ses enfants restent des personnalités incontournables de la première république de Chine, connus collectivement comme la dynastie Song.
Notes
Voir aussi
Histoire de la République de Chine
Bibliographie
- Sterling Seagrave The Soong Dynasty 1996, Corgi Books, (ISBN 0-552-14108-9) (ouvrage considéré en 2007 comme le plus complet)
- Emily Hahn The Soong Sisters Doubleday, 1942 (ouvrage de référence avant le livre de Seagrave, écrit avec la collaboration des soeurs Song mais pour cette raison édulcoré)
- Clark, Elmer T. The Chiangs of China, Abingdon-Cokesbury, Nashville, 1943 (écrit par un missionnaire méthodiste, contient le plus d’informations sur les débuts et des photos exclusives)
- Soong Family in Biographical Dictionary of Republican China Columbia University Press, New York et Londres, 1970