Le glyphosate (N-(phosphonométhyl)glycine, C3H8NO5P) est un désherbant total, c’est-à-dire un Herbicide non-sélectif, autrefois produit sous brevet, exclusivement par la société Monsanto à partir de 1974, sous la marque Roundup. Le Brevet étant tombé dans le domaine public en 2000, d'autres sociétés produisent désormais du glyphosate. Le glyphosate seul est peu efficace, car il n'adhère pas aux feuilles ni ne les pénètre facilement. On lui adjoint donc un Tensioactif (ou surfactant) qui est soupçonné d'être une cause de toxicité des désherbants contenant du glyphosate.
Quelques espèces de plantes ont commencé à développer des résistances au glyphosate.
Propriétés chimiques
Le glyphosate est un
Acide organique faible, analogue d'un
Acide aminé naturel, la glycine, doté d'un groupement phosphonate.
Son nom est la contraction de glycine, phospho- et -ate.
De cette structure, il présente 4 pKa (0,7 ; 2,2 ; 5,9 ; 10,6). Zwitterionique quel que soit le pH, il est aussi très soluble dans l'eau et très polaire (LogP < -3,2). Dans les sols, il est assez rapidement adsorbé, et cette adsorption (plus ou moins importante selon le pH) le rend normalement assez peu mobile. Son principal produit de dégradation est l'AMPA ou acide aminométhylphosphonique, résultant de la perte du groupe Acétate.
Pour accroître sa Solubilité et son passage dans la plante et la Sève, les industriels le préparent souvent sous forme de sel d’isopropylamine (C6H17N2O5P, Roundup). Des additifs (tensio-actifs, tels que la polyoxyéthylène amine) lui sont ajoutés pour le fixer sur les plantes .
Mécanisme d'action
Le mécanisme d'action de ce pesticide n'est pas entièrement compris à l'heure actuelle. On sait cependant que son action phytotoxique est due à l'inhibition de l'
Enzyme 5-enolpyruvoyl-shikimate-3-phosphate synthase (EPSPS) impliquée dans la voie métabolique de l'
Acide shikimique, laquelle est nécessaire pour la synthèse des
acides aminés aromatiques tels que la
Phénylalanine, la
Tyrosine et le
Tryptophane ; ces acides aminés participent à la synthèse des
vitamines et de beaucoup de métabolites secondaires tels que les
folates, l'
ubiquinone et des naphthoquinones. Cette voie étant absente chez les animaux, il fut supposé de faible toxicité chez eux. Cependant, de nombreuses études tendent à démontrer le contraire.
[#]Présence dans l'Environnement
Dans les sols
Les taux de glyphosate y sont difficiles à mesurer en raison du fait qu'il est absorbé sur les particules du sol et difficile à extraire sans le dénaturer. Il y est probablement souvent présent, car c'est le premier désherbant et le premier pesticide vendu au monde, avec une quantité qui a plus que doublée en 4 ans, passant de 0,5 et 1 million de kilogrammes en 1986 à plus de 2 millions de kilogrammes en 1990.
Il est très utilisé en Forêt (pour préparer et dégager les plants), pour le désherbage en vue de l’ensemencement de nombreuses cultures et comme défoliant pour certaines autres cultures (Blé, orge, légumes, Colza ou Moutarde sauvage, lin, cultures fourragères, et ou dans les jardins par les particuliers et parfois pour la culture sans labour (qui peut l'éviter en semant sous paille par exemple). Les pays qui ont autorisé la culture d'OGM ont vu sa consommation augmenter car de nombreux OGM sont résistants au glyphosate.
Dans l'eau
Le glyphosate y est soluble (12 g/L à 25 °C dans l'eau douce). Il était réputé peu mobile et à faible risque de contamination des nappes, mais depuis qu'on le cherche, on en trouve dans de nombreuses eaux. Il est plus mobile et soluble dans les sols alcalins ou riches en
phosphates (engrais très utilisés par certains agriculteurs). Une étude a détecté des taux de 200 à 300 µg/L de glyphosate peu après une pulvérisation directe dans de l’eau stagnante. Ce taux n'a été réduit que de moitié après trois semaines environ. Or le Roundup a pu être légalement ou non utilisé pour désherber des mares et étangs de pêche. La nature des microbes présents, la présence ou absence d'un biofilm important, la quantité d'
ultraviolets, la température (saison) et le pH jouent probablement également un rôle dans la vitesse de dégradation du glyphosate dans l'eau. D'autres sources citent une pulvérisation directe sur lacs et étangs de 1 kg/ha suivie d'une concentration initiale de 1 100 µg/L réduite à 149 µg/L après deux jours et à 55 µg/L après cinq jours.
En Sylviculture (au Québec) après pulvérisation, on n'en a pas trouvé (seuil de détection de 1,0 µg/L) dans huit cours d’eau protégés par une zone tampon de 30 m, mais on en a trouvé dans deux échantillons provenant de fossés (16,9 µg/L au max.). Dans les étangs ayant reçu une pulvérisation directe, le taux était de 2 800 µg/L dans l'eau juste après la pulvérisation, mais avait chuté à 288 µg/L 24 heures plus tard. La cinétique du glyphosate dans les sédiments semble peu étudiée.
Dans l'air
Sa faible tension de vapeur (<1×10
-5 Pa à 25 °C) le rend peu soluble dans l'air, mais il peut y être présent sous forme d'
Aérosol ou fixé sur des poussières issues de sol poudreux et sec traité. Il peut être pour partie dégradé par photodécomposition sous l'effet des
ultraviolets de la lumière solaire.
Utilisations et polémiques
Le glyphosate est notamment utilisé par le gouvernement
colombien, aidé par le gouvernement des
États-Unis dans son
Plan Colombie pour détruire les champs de
Coca produisant de la drogue qui finance des actions de groupes rebelles. Ces actions détruisent des milliers d'hectares de reliques de
forêt tropicale, parfois classées
réserves naturelles, comme la forêt du
Putumayo, et des exploitations agricoles légales. Les populations de ces forêts craignent des impacts sur leur santé, comme dans le cas du Roundup pulvérisé en
Palestine, ou, antérieurement, avec l'
Agent orange utilisé comme défoliant pendant la guerre du
Viêt Nam. Les communautés amérindiennes sont parmi les premières touchées. L'Équateur voisin craint aussi des conséquences sanitaires et écologiques des fumigations colombiennes de glyphosate près de ses frontières, dans le
Putumayo. Le refus colombien d'abandonner ces pulvérisations aériennes a provoqué en 2006-2007 une crise diplomatique entre les deux pays.
La culture majoritaire de soja OGM résistant au glyphosate en Argentine a entraîné une utilisation massive de ce désherbant. Des résistances sont apparues, amenant à l'utilisation de doses de plus en plus importantes. La dévégétalisation des sols, associée au labour, est cause de perte d'Humus, d'une dévitalisation et d'une dé-fertilisation des sols.
La polémique a aussi porté sur la biodégrabilité de désherbants contenant du glyphosate. Un fabricant (Monsanto) a perdu un procès parce qu'il avait présenté sur ses étiquettes et affiches le Roundup comme dégradable ou biodégradable (dans le sol comme dans l'eau). La demi-vie du glyphosate (le temps nécessaire pour que 50 % des molécules de glyphosate soient dégradées) est, en conditions de laboratoire, d'environ 32 jours dans le sol et de 3,3 jours dans l'eau, avec une efficacité variant selon la richesse du sol en bactéries, la température, la nature et l'acidité du sol, etc. Elle varierait de 20 à 100 jours selon l’état du sol d'après d'autres sources . Le glyphosate se dégrade en sous-produits, eux-mêmes difficilement biodégradables, avec des délais variant selon le contexte.
Le problème est que ces chiffres semblent porter sur la matière active et non sur le surfactant, ni sur les impacts synergiques possibles des sous-produits de dégradation, notamment lorsqu'il sont combinés avec les produits de dégradation du surfactant qui pourrait être une des causes de toxicité du produit.
Contamination des milieux (eau, air, sol)
Enfin, les analyses permettant de détecter le glyphosate dans l'eau ont longtemps été difficiles, longues et coûteuses. Elles étaient donc rares. Depuis que dans les années 2000, des progrès techniques ont amélioré leur précision et en ont diminué les coûts, on prend conscience que bien que dégradable, le glyphosate est très souvent présent dans les eaux et les sols. Une étude de l'IFEN (août 2006) a montré que le glyphosate et l'
AMPA, son produit de dégradation, étaient les substances les plus retrouvées dans les eaux en France . En effet, le glyphosate est maintenant l'herbicide le plus vendu en France.
On a commencé dans les années 2000 à étudier la volatilité et la cinétique du glyphosate dans l'air (où l'on retrouve d'autres pesticides qui peuvent aussi contaminer les pluies), mais les mesures (en 2006/2007) sont encore très imprécises car les résines adsorbantes chargées de piéger le glyphosate dans l'air des analyseurs le fixent mal, une partie du glyphosate étant désorbé du filtre au fur et à mesure que l'air y passe.
De plus, étant donné l’importance probable des synergies entre produits, entre produits et molécules de dégradation, et entre toutes ces molécules et celles de l'environnement ou de notre organisme, toute évaluation certaine du risque reste difficile étant donné la rareté des données et éléments toxicologiques disponibles. Les premières analyses doivent être considérées comme de premiers indices et éventuellement des éléments d'aide à la précaution/Prévention.
Écotoxicologie
Quelques études laissent penser que le glyphosate pourrait peut-être réagir avec les
nitrites présents dans certains aliments, mais aussi dans les
sols agricoles pour former le N-nitrosophosphonométhylglycine, un
Cancérogène possible.
Toxicologie
La
DL50 du glyphosate pur se situe à environ 1 % du poids corporel. Les effets toxiques immédiats sont faibles, même à hautes doses. On note cependant une réduction notable du poids corporel et du poids du
Foie. Plusieurs cas de
Suicide par ingestion de désherbant à base de glyphosate ont montré que la formulation commerciale (contenant un ou des additifs) est réellement
toxique, et à des doses très inférieures aux doses de glyphosate qui seraient nécessaires pour provoquer la mort, probablement en raison de la toxicité et de l’effet
synergique du surfactant, ce qui avait été démontré expérimentalement chez des
poissons notamment.
Les études de laboratoire, généralement faites ou financées par le fabricant, ont montré que le glyphosate ingéré était absorbé pour 15 à 40 % de la dose ingérée. Quant à son premier sous-produit de dégradation (l’AMPA), il est absorbé à environ 20 % de la dose ingérée.
Une autre étude a montré chez des singes que l’absorption cutanée d’une préparation de glyphosate était faible (2 % après sept jours d’application locale). Mais le passage transcutané peut varier selon les espèces, les conditions (transpiration) et l’âge (chez l'humain, la peau des enfants est par exemple beaucoup plus perméable). Une dose ingérée (ou injectée (intrapéritonéale)), unique ou répétée durant 12 jours, est éliminée en grande partie via l’urine, essentiellement sous une forme non dégradée, bien que l’on trouve aussi de petites quantités d’AMPA. L’excrétion biliaire et la circulation entéro-hépathique sont quantitativement minimes après 120 heures. Une dose unique de glyphosate était éliminée à 94 % dans les urines, chez les mâles et les femelles (0,1 % seulement d’une dose étant éliminée sous la forme de dioxyde de carbone marqué 22), en condition de laboratoire (animaux peu mobiles, non malades, non exposés aux aléas climatiques, etc.). L’ingestion quotidienne de glyphosate durant 2 semaines se traduit par des concentrations tissulaires maximales au sixième jour d’administration. Les concentrations les plus fortes étant mesurées dans les reins (<1 ppm), puis de manière décroissante dans la Rate, les tissus adipeux, le Foie, les ovaires, le Coeur et les muscles, les résidus diminuant progressivement après que l’animal ait cessé d’ingérer le produit dans sa nourriture, les concentrations rénales étant de 0,1 ppm après 10 jours. Il est délicat de tirer des conclusions toxicologiques des nombreuses études faites chez l'animal avec du glyphosate pur car dans la réalité, c'est un mélange glyphosate-additif qui est susceptible de poser problème par contact ou ingestion.
Il est néanmoins avéré que le glyphosate demeure un toxique puissant agissant notamment sur les cellules Placentaires humaines entraînant une multiplication des avortements spontanés tardifs. Il a été démontré que différents herbicides à base de glyphosate ralentissaient le cycle des divisions cellulaires chez l'embryon d'Oursin, ce qui pourrait, selon les auteurs de cette étude, causer des cancers.
Efficacité et résistances
Le glyphosate s'est d'abord montré extrêmement efficace, puis sont peu à peu apparues des souches de mauvaises herbes résistantes. Les cultures OGM résistantes au glyphosate, surtout développées aux Etats-Unis à la fin des années 1990, ont contribué à une augmentation de l'usage du glyphosate dans les parcelles OGM (93 % des surfaces en
Soja aux USA en 2006). Ce sont en 2007 sept
adventices qui ont produit des souches résistantes à ce
Pesticide, dont
Ambrosia trifida (l'Ambroisie trifide ou Grande Herbe à poux) trouvée dans l'
Ohio et l'
Indiana, qui est une plante qui s'installe facilement dans le
Soja, occasionnant jusqu'à 70 % de diminution de rendement . En France, l'INRA de
Dijon a confirmé en 2007 un premier cas de résistance au glyphosate d'une espèce végétale : l'
Ivraie raide (Lolium rigidum).
Certains craignent aussi que par pollution Génétique des crucifères sauvages acquièrent le Transgène de résistance au Glyphosate, et ne puissent plus être désherbés dans les champs ou bords de route par les désherbants totaux basés sur le glyphosate.
Réglementation
Sur le plan de la réglementation des produits phytopharmaceutiques :
- pour l’Union européenne : cette substance active est inscrite à l’annexe I de la Directive 91/414/CEE par la directive 2001/99/CE.
- pour la France : cette substance active est autorisée dans la composition de préparations bénéficiant d’une autorisation de mise sur le marché.
Notes et références
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Voir aussi
Liens internes
Liens externes