Pour les articles homonymes, voir Joseph de Puisaye (homonymie).
Joseph-Geneviève, comte de Puisaye, est né à Mortagne-au-Perche en 1755 et est mort à Hammersmith, près de Londres (Angleterre) le 13 septembre 1827. Il était une des principales figures françaises de la Contre-révolution .
Il nait dans une famille d'ancienne noblesse qui occupe la charge héréditaire de grand bailli du Perche. Comme beaucoup de cadets de familles nobles, il est destiné aux ordres (on le tonsure à 7 ans), mais il préfère embrasser une carrière militaire.
En 1783, il achète une charge de colonel des Cent-Suisses de la Maison du Roi. En 1788, il épouse Louise Le Sesne, héritière du marquis de Ménilles, propriétaire du château de Ménilles, à proximité de Pacy-sur-Eure. Ses attaches avec sa région natale demeurent pourtant fortes puisqu'en 1789, il est élu député de la noblesse du Perche aux États généraux. Il se range du côté de la minorité de cet ordre, se réunit au tiers état, mais demeure très discret à l'assemblée nationale.
Le 24 juin 1790, il proteste pourtant contre l'abolition de la noblesse. Promu en 1791 Maréchal de camp, il se retire après la session dans sa terre de Ménilles. Il sera élu à la tête de la garde nationale du district d'Évreux.
Du fédéralisme à la contre-révolution
Quoique grand admirateur de la constitution britannique, favorable aux réformes, il devient un opposant résolu au régime en raison de la mise en accusation du roi. Il rejoint l'opposition girondine et reçoit, conjointement avec Wimpffen, le commandement de l'armée fédéraliste de Normandie en
1793.
Ses troupes seront mises en déroute en juillet, lors de la bataille de Brécourt, dite « bataille sans larmes », car, en réalité, l'affrontement n'en fut pas un... Puisaye avait passé la nuit dans son château de Ménilles, où se trouvait son épouse, laissant son armée campée non loin de là, sur le plateau de Madrie, à proximité du château de Brécourt. Les troupes fédéralistes, assez peu motivées, et sans doute embrumées par les vapeurs des libations qu'elles avaient faites durant la nuit grâce aux caves du château et à celles du village voisin, furent réveillées en sursaut à l'aube par un coup de canon tiré par le camp opposé... Cela suffit à provoquer une panique, une retraite précipitée et une débâcle générale...
Puisaye entre alors dans la clandestinité. Il gagne la Bretagne, où il rallie et réorganise dans le département d'Ille-et-Vilaine les débris de la chouannerie, auquel les frères Chouan avaient donné leur nom. Il se montre très actif, se mettant en rapport avec d'autres chefs, créant un conseil militaire, émettant un papier-monnaie, envoyant des émissaires à Londres, d'où il finira par recevoir des pouvoirs du comte d'Artois et des secours en argent et en armes du gouvernement anglais. Redoublant d'efforts pour devenir le fédérateur de la confédération royaliste de Bretagne, il multiplie les proclamations, et, bien qu'il ne soit pas reconnu par la totalité des autres chefs chouans, il finira par apparaître comme l'âme du parti royaliste dans ce pays.
L'expédition de Quiberon
Au mois de septembre
1794, il passe secrètement en Angleterre, où il est accueilli de façon réservée. Les émigrés le considèrent volontiers, en effet, comme comme un ami de circonstance, voire un agent de la Convention. Puisaye se lie pourtant avec le comte de Botherel et avec
La Marche, évêque de Saint-Pol de Léon. Il finit par obtenir du comte d'Artois (futur
Charles X), alors à
Édimbourg, des pouvoirs quasi illimités, et gagne la confiance des ministres Pitt, William Windham Grenville, et
Henry Dundas. Ces derniers finissent par lui confier la responsabilité d'une opération de débarquement sur les côtes de Bretagne, conjointement avec Louis Charles d'Hervilly. Ce dernier avait reçu le commandement des régiments d'émigrés, tandis que Puisaye, pourvu du titre de lieutenant général, avait pleine autorité sur les royalistes de l'intérieur en Bretagne et en Normandie.
Amenée par une flotte de trois vaisseaux de ligne, six frégates et quelques canonnières, escortant 97 bateaux de transport, l'armée des émigrés débarque en deux temps à Quiberon à partir du 25 juin 1795.
Le plan de Puisaye consistait à marcher aussitôt après le débarquement dans l'intérieur de la Bretagne pour généraliser l'insurrection. D'Hervilly, au contraire, avec Charles de Sombreuil, hésite : il se confine dans la presqu'île de Quiberon en attendant des renforts. Le général Lazare Hoche profite de la situation, occupe le terrain, s'empare du fort Penthièvre, qui commande l'entrée de la presqu'île, et engage le combat contre un adversaire encore mal organisé. On dénombrera 1200 morts dans les rangs des émigrés. 10 000 prisonniers sont faits par les troupes de Hoche. Les instructions de la Convention, relayées par les commissaires de la République, Blad et Tallien, étaient sans appel. Les femmes et les enfants sont remis en liberté, mais 757 condamnations à mort sont prononcées (un peu plus de 600 émigrés et une centaine de chouans); quelques rares condamnés parviendront à s'échapper avant l'exécution (entre six et trente suivants les sources).
Puisaye, avec quelques émigrés, est parvenu à rejoindre la flotte anglaise. Ses adversaires vont dénoncer ses responsabilités dans l'affaire en utilisant les épithètes les plus outrageantes.
S'étant fait débarquer de nouveau en Bretagne dans des circonstances peu favorables, il échoue dans sa tentative de fédérer les forces royalistes. Sa morgue et sa hauteur le rendent impopulaire, d'autant qu'il est en butte aux critiques des proches de Cadoudal. Désavoué par le comte d'Artois, dont il avait annoncé prématurément la venue en Vendée, il résilie son commandement le 5 décembre 1797.
Un réprouvé
Il repasse alors à Londres, obtient du gouvernement anglais en août
1798 une concession dans le
Comté de York, au
Canada, assortie de quelques subsides. Suivi de quelques officiers et soldats lui étant restés fidèles, il tente d'y implanter une colonie chouanne. Ce sera un échec, et Puisaye s'installera à Niagara avant de revenir en Angleterre en 1803.
A Londres, il doit faire face à l'hostilité des émigrés et des princes (le comte d'Artois notamment). Ils se montrent en effet dubitatifs quant à la sincérité de son royalisme ; ils contestent ses capacités militaires, et ils ne sont pas loin de le considérer comme un instrument du gouvernement anglais, d'autant qu'il avait obtenu la nationalité britannique en 1802. Puisaye irritera davantage en publiant ses Mémoires en six volumes, plaidoyer pro domo, vivement contesté par ses adversaires .
Puisaye ne rentra pas en France après la Restauration, certainement en raison de l'hostilité de Louis XVIII, du futur Charles X et de la plupart des anciens émigrés. Il continua à vivre en Angleterre, où il recevait une pension substantielle du gouvernement britannique. Il mourut à Blythe-House près de Hammersmith.
Ses archives ont été léguées au British Museum.
Notes
Bibliographie
- Dominique Varry, "Sous la main de la Nation". Les Bibliothèques de l'Eure confisquées sous la Révolution française, Fernay-Voltaire, Centre international d’étude du XVIIIe siècle, 2005.
- Maurice Hutt, Chouannerie and Counter-Revolution, Puisaye, the Princes and The British government in the 1970's, Cambridge, 1983.
Source partielle
« Joseph_de_Puisaye », dans Louis-Gabriel Michaud,
Biographie universelle ancienne et moderne : histoire par ordre alphabétique de la vie publique et privée de tous les hommes avec la collaboration de plus de 300 savants et littérateurs français ou étrangers, 2
e édition, 1843-1865
[détail édition]