Maison de France est le nom de la
dynastie capétienne.
Le 29 juin 1768, avec la mort d'Hélène de Courtenay (1689-1768), s'éteignit la branche de Courtenay des Capétiens, faisant de celle issue des ducs de Bourbon - et par eux du dernier fils de saint Louis -, devenue branche aînée depuis 1589, la seule branche légitime de la dynastie. C'est pourquoi officiellement depuis 1768 (et en pratique depuis plus longtemps encore, les derniers Courtenay étant peu connus) la maison de France put être couramment appelée maison de Bourbon. Notons que la maison de Bragance, dont sont issus les rois de Portugal et les empereurs du Brésil, est bien capétienne, mais descend d'un fils naturel et n'est donc pas dynaste en France.
Le chef de la maison de France (ou depuis 1768 « maison de Bourbon ») fut jusqu'en 1830 le roi de France. Depuis le décès du comte de Chambord en 1883, les royalistes se divisent sur la question entre partisans des Bourbons dits "Bourbons d'Espagne" et partisans des Orléans dits "Bourbons Orléans".
Branche aînée des Bourbons (dits « Bourbons d'Espagne »)
Selon les partisans de la branche aînée des Bourbons, le chef de la maison de France doit être, quelle que soit sa nationalité, l'aîné de tous les descendants d'
Hugues Capet, et serait donc actuellement Louis de Bourbon (né en
1974), « duc d'Anjou », connu dans les cercles légitimistes (et dans la presse française et espagnole) sous le nom de « Louis XX », descendant du roi d'
Espagne Philippe V, petit-fils de
Louis XIV, roi de
France.
Comme son père Alphonse de Bourbon (1936-1989), Louis de Bourbon s'intitule « chef de la maison de Bourbon ». Notons qu'il a la nationalité française, héritée de la mère d'Alphonse de Bourbon Emmanuelle de Dampierre, « duchesse d'Anjou et de Ségovie ». Son grand-père Jacques Henri de Bourbon, de nationalité espagnole, s'était déclaré "chef de la maison de France" à la mort de son père l'ex-roi Alphonse XIII d'Espagne. Louis de Bourbon porte les pleines armes de France ; son père s'en était vu confirmer le droit par la justice française (cf. infra).
Ses partisans se nomment eux-mêmes 'légitimistes', leurs adversaires préférant les termes de « Blancs d'Espagne ».
Branche des Orléans (dits "Bourbons Orléans")
Pour les partisans de la branche cadette des Bourbons, le chef de la maison de France ne peut être que l'aîné des Bourbons restés continûment Français, à savoir le chef de la maison d'Orléans, descendant de Philippe de France (
1640-
1701), duc d'Orléans, frère de
Louis XIV, et de
Louis-Philippe Ier, roi des Français : l'actuel 'comte de Paris et duc de France',
alias "Henri VII".
Les Orléans se déclarent la seule « maison de France » depuis 1883, et font usage depuis cette date du nom « de France » (qui ne figure toutefois pas à leur état civil) et des armes pleines de France (d'azur à trois fleurs de lis d'or) pour leur chef.
Leurs partisans sont appelés - à tort à leurs yeux - "orléanistes" ; en effet, depuis la mort du 'comte de Chambord', dernier "Bourbon de France", en 1883, les Orléans revendiquent la qualité d'héritiers légitimes du trône de France suite à une "fusion". Il n'y a donc plus, selon leurs partisans, de distinction entre légitimistes et orléanistes depuis plus d'un siècle.
Confrontation des arguments de chaque branche
Arguments des Orléans
- Les Orléans ne nient pas que les "Bourbons d'Espagne" soient leurs aînés, mais rappellent que, lors des traités d'Utrecht, Philippe de France, duc d'Anjou, devenu Philippe V d'Espagne, aïeul des Bourbons d'Espagne, a renoncé pour lui-même et ses descendants à ses droits sur le trône de France.
- Les "Bourbons d'Espagne", installés à l'étranger "sans espoir de retour", seraient affectés d'un "vice de pérégrinité". Concernant la succession de Charles IV, un chroniqueur a ainsi pu écrire que les barons ont choisi Philippe de Valois, car il était "né du royaume", outre qu'il était son plus proche collatéral par les mâles. C'est le même principe "de nationalité française", si l'on peut dire, l'expression étant anachronique, qui a motivé pour l'essentiel le fait que les états généraux de 1593 aient repoussé la canditature de l'infante Isabelle suite à l'extinction des Valois.
Arguments des Bourbons
- La règle d'indisponibilité de la couronne, l'une des lois fondamentales du royaume, s'impose à tous, même au roi : on hérite du trône, on ne peut y renoncer. Les clauses du traité d'Utrecht stipulant la renonciation de Philippe V et sa descendance ne seraient donc pas valides, et la succession continuerait par ordre de primogéniture mâle :
Le Prince le plus proche de la Couronne en est héritier nécessaire (…) il succède, non comme héritier mais comme le maître du Royaume dont la seigneurie lui appartient, non par choix, mais par le seul droit de sa naissance. Il n'est redevable de la Couronne ni au Testament de son prédécesseur, ni à aucun édit, ni à aucun décret, ni enfin à la libéralité de personne, mais à la loi. Cette loi est regardée comme l'ouvrage de Celui qui a établi toutes les monarchies, et nous sommes persuadés, en France, que Dieu seul la peut abolir. Nulle Renonciation ne peut donc la détruire. (Torcy, négociateur du Traité d'Utrecht, le 18 mars 1712 dans un mémoire aux négociateurs anglais).
Pour les partisans des "Bourbons d'Espagne", Louis XIV n'a signé ce traité que pour obtenir la paix, cette renonciation serait aussi invalide au regard des lois fondamentales que la désignation des bâtards du roi comme héritiers de la couronne en cas d'extinction des branches légitimes. Ils soulignent que, le 15 septembre 1789 encore, l'Assemblée Nationale conclut trois jours de travaux par cette déclaration : La couronne se transmet de manière héréditaire de mâle en mâle, par ordre de primogéniture, à l’exclusion absolue des femmes et de leurs descendants, sans préjugé de l’effet des Renonciations.
En outre, selon les légitimistes, à supposer que cette clause ait été valide, elle ne pouvait l'être que tant qu'était maintenue la loi salique en Espagne. Or, en 1830, le roi Ferdinand VII d'Espagne a modifié unilatéralement la loi de succession au trône d'Espagne, en supprimant la loi salique pour permettre à sa fille Isabelle de régner. Quelques années auparavant, Louis-Philippe (d'Orléans) lui-même avait craint dans ses mémoires la supériorité du droit des Bourbons d'Espagne en un tel cas : Ce n’est pas seulement comme Français que je prends un vif intérêt à cette question, c’est aussi comme père. Dans le cas, en effet (ce qui n’arrivera jamais de mon temps) où nous aurions le malheur de perdre M. le duc de Bordeaux sans qu’il laissât d’enfant, la Couronne reviendra à mon fils aîné, pourvu que la loi salique soit maintenue en Espagne ; car, si elle ne l’était pas, la Renonciation de Philippe V au Trône de France, en son nom et au nom de ses descendants mâles, serait frappée de nullité, puisque ce n’est qu’en acte de cette Renonciation que les descendants de ce Prince ont acquis un droit incontestable à la Couronne d’Espagne ; mais si ce droit leur est enlevé, ils peuvent réclamer celui que leur donne la loi salique française à l’héritage de Louis XIV. Or, comme petits-fils de Louis XIV, ils passent avant mes enfants.
- Les légitimistes rappellent qu'aucun principe de nationalité ne saurait exclure les "Bourbons d'Espagne", un tel principe étant inconnu de l'ancien droit.
- Pour les légitimistes, les arguments des Orléans seraient contradictoires, car, en s'appuyant notamment sur des traités internationaux (Utrecht), les Orléans reconnaîtraient la supériorité d'une norme internationale sur le droit interne, pour ensuite reprocher aux "Bourbons d'Espagne" d'être affectés d'un "vice de pérégrinité" leur interdisant de prétendre au trône de France. Il ressort de cette querelle que les Orléans seraient favorables à l'idée d'"adaptation" des lois fondamentales. La règle de succession par primogéniture mâle serait donc, selon eux, relative.
Procédures
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- Contestation par Henri d'Orléans du droit au port par Alphonse de Bourbon (1936-1989) des pleines armes de France :
Tribunal de grande instance de Paris, 21 décembre 1988, Prince Henri d'Orléans, JCP 89.II.21213
Sur le port des armes pleines,
Attendu que les armoiries sont des marques de reconnaissance accessoires du nom de famille auquel elles se rattachent indissolublement, que cette famille soit ou non d'origine noble ; qu'il s'ensuit que les armoiries sont l'attribut de toute la famille, et qu'elles jouissent de la même protection que le nom lui-même ;
Attendu que les armes en litige, constituées de « trois fleurs de lys d'or en position deux et un sur champ d'azur » n'ont été celles de France qu'autant que régnait l'aîné de la Maison de Bourbon à laquelle elles appartiennent - qu'elles sont devenues emblèmes privés à l'avènement du roi Louis-Philippe ;
Attendu que selon les anciennes coutumes, les armes pleines étaient réservées aux aînés, les cadets devant introduire une brisure dans leur blason ; qu'ainsi, les princes de la Maison d'Orléans, branche cadette des Bourbons, portaient, y compris le roi Louis-Philippe, les armes des Bourbons avec un lambel (brisure) d'argent ; ... que le port de ces armes sans brisure, qui résulte d'un usage ouvert et constant des Bourbons d'Espagne depuis plus de cent ans...
Par ces motifs, le Tribunal, - déclare irrecevable Henri d'Orléans en ses demandes d'interdiction de port de titre et d'armoiries, ainsi que Ferdinand de Bourbon-Siciles et Sixte-Henri de Bourbon-Parme en leur intervention ; laisse au demandeur et aux intervenants la charge des dépens.
Confirmé par la cour d'appel de Paris, 22 novembre 1989 (appel de TGI Paris 21.12.1988 ; D.90, I.R. 4 ; JCP 90.II.21460 ; GP 08.03.1990)
- Demande de changement du nom d'Orléans en de Bourbon par Henri d'Orléans : rejet par les juridictions judiciaires.
Querelle récente autour du titre de "duc d'Anjou"
Le "comte de Paris" a titré son neveu Charles-Philippe d'Orléans "duc d'Anjou" en 2004, titre de courtoisie également porté depuis 1989 par l'aîné des Bourbons, Louis-Alphonse de Bourbon, soutenu par les légitimistes.
Références
Voir aussi