Pour les articles homonymes, voir Orne (fleuve) (homonymie).
L'Orne est un Fleuve côtier du Nord-ouest de la France, c'est le deuxième plus important des cours d'eau normands après la Seine, par sa longueur (170 kilomètres) et son débit. Après s'être frayé un chemin à travers les hauteurs de la Suisse normande, l'Orne arrose la ville de Caen, puis canalisée, débouche dans la Manche par un estuaire d'une grande richesse écologique.
Géographie
L'Orne prend sa source aux environs d'
Aunou-sur-Orne, au Nord-est de la
Forêt d'Écouves, près de
Sées à 240 mètres d'altitude, dans le département de l'Orne (61). Elle coule, en direction du Nord-ouest, dans la plaine
Calcaire d'
Argentan, puis surimpose sa vallée sinueuse et escarpée dans les
granits d'Athis et les
schistes et
grès de la
Suisse normande formant des gorges pittoresques. De Putanges à la forêt de
Grimbosq, l'Orne parcoure sa
trouée héroïque dans un environnement de buttes élevées et sauvages (mont d'Ancre, mont Cerisy), traçant un sillon profond encadré de parois rocheuses impressionnantes (rochers des Parcs, rochers de la Houle, Pain de Sucre) près de
Clécy. De nombreux moulins et sites de gué égayent le fond de la vallée. Juste en aval de Putanges, à l'entrée des gorges, le barrage de
Rabodanges a été édifié, en 1960, pour régulariser le débit du fleuve et produire de l'électricité (puissance de 6 500 kW), créant un lac artificiel d'une longueur de 7 km. Dans la dernière partie de son cours, après avoir franchi, près de
Thury-Harcourt, la boucle du Hom et ses schistes, témoins de la chaîne cadomienne vieille de 650 à 540 millions d'années, l'Orne contourne le Cinglais, traverse la plaine de Caen avant de rejoindre la
Manche à
Ouistreham, dans le département du Calvados (14).
A Caen, un petit bras d'eau, la Noë, se détache du fleuve en amont de Vaucelles, vers Montaigu, et traverse la Prairie. Il est ensuite rejoint par les Odon et se jete dans le bras principal de l'Orne à l'extrémité du cours Montalivet. Depuis 1845, le cours aval de l'Odon a été canalisé pour former le Bassin Saint-Pierre. Depuis 1860, la Noë est recouverte entre la Cité Grusse et la place Courtonne. Depuis les années 1930, le Grand Odon rejoint la Noë en longeant les boulevards de ceinture au nord de la Prairie.
Entre Caen et l'estuaire, le cours de l'Orne est doublé, sur une quinzaine de kilomètres, par un canal que peuvent emprunter des navires de haute mer. Cette voie d'eau fut inaugurée, en 1857, par Napoléon III et l’Impératrice Eugénie. Le port de Caen, composé de plusieurs bassins situés à proximité du centre ville ( bassin Saint-Pierre, nouveau bassin, bassin de Calix ), n'est plus très actif aujourd'hui; l'essentiel du trafic est maintenant concentré dans l'avant-port d'Ouistreham.
Hydrographie/hydrologie
L'Orne draine un important bassin de 2 932 km² dans le cadre d'un climat océanique marquée par la topographie, ainsi la vallée du fleuve est moins arrosée que les plateaux dont sont issus ses affluents. Le débit de 27,5 m³/s à l'embouchure est largement supérieur à celui des autres fleuves côtiers bas-normands (
Touques,
Vire ), mais se montre très irrégulier : les étiages sont particulièrement bas, l'écart, entre ceux-ci les hautes eaux, considérable dans un tel milieu (5,13 m³/s en août contre 60,3 m³/s en janvier pour un débit moyen de 23,8 m³/s à
May-sur-Orne, quelques kilomètres en amont de Caen).
Les principaux affluents de l'Orne (de l'aval vers l'amont) sont :
Histoire
Aménagements : la basse vallée de l'Orne
Le cours inférieur de l'Orne a été, depuis plus de deux siècles, l'objet de l'attention des hommes et le lieu d'aménagements nombreux destinés à relier efficacement Caen à la mer.
A la fin du XVIIIe siècle, les habitants de la région devaient à la fois lutter contre l’ensablement de l’estuaire qui menaçait le débouché maritime de la grande cité normande et protégeait cet espace d’éventuelles attaques de la marine anglaise (de nombreux ouvrages défensifs – redoutes, corps de garde – furent ainsi édifiés). La préoccupation économique l’emporta et un projet de canalisation, ayant pour objectif de supprimer l’influence des marées dans la basse vallée de l’Orne, fut proposé par l’ingénieur Cachin dès 1798. Cette étude minutieuse proposait de redresser le cours du fleuve, évitant les sinuosités multiples, avec un accès direct pour les navires de moyen tonnage au bassin sis au pied des remparts de Caen, et la construction d’un avant-port à Ouistreham. La construction du Canal et l’aménagement de ses abords ne furent entrepris que sous le Second Empire et l'ouvrage fut inauguré le 23 août 1857). La nouvelle voie d’eau mesurait 14 kilomètres, avait une largeur de 15 mètres et une profondeur dépassant les 5 mètres. Pour suivre les mutations de la marine marchande et l’augmentation du trafic, elle fut progressivement élargie et approfondie pour atteindre une cinquantaine de mètres de large et une profondeur de plus de 9,5 mètres (le gabarit maximum pour les navires est fixé à 181,30 m sur 18 m, avec un mouillage de 7,75 m). Les échanges maritimes concernaient, jusqu'à la fin du pouvoir napoléonien, surtout les produits agricoles et le charbon, mais l’exploitation, à partir de 1875, du minerai de fer normand dont une partie était exportée et l’implantation d’une industrie sidérurgique, en 1912, à Mondeville (Société des Hauts Fourneaux et Aciéries de Caen, puis, en 1924, Société Métallurgique de Normandie ou SMN, enfin Unimétal Normandie en 1981) changèrent la nature du trafic et s’accompagnèrent de la construction de nouveaux bassins et de la mise en place, en 1917, de chantiers navals à Blainville-sur-Orne, 7 kilomètres au nord-est de Caen au bord du canal.
L’Orne supporta ainsi un trafic intense durant l’entre-deux-guerres et jusque dans les années 1970. La concurrence du fer étranger provoqua le déclin de la production locale et la fin des exportations avant la fermeture définitive de la dernière mine en 1989 à Saint-Clair-de-Halouze, alors que la sidérurgie connaissait le même destin, le site de production de l'usine sidérurgique cessa ainsi son activité en 1993. Les chantiers navals avaient déjà fermé en 1954, l’Orne ne pouvant, par son étroitesse, supporter le passage des cargos modernes. Le port de la ville de Caen ne connaît plus aujourd'hui qu'un trafic limité, mais l'activité portuaire s'est déplacée vers l'aval avec l'avant-port d'Ouistreham qui assure, depuis 1986, une liaison transmanche avec Portsmouth.
Quand on voulait relier l'Orne à la Loire
Les projets visant à rendre navigable l'Orne en amont de Caen, jusqu'à
Argentan, ont été nombreux à voir le jour au
XVIIIe siècle et au début du
XIXe, mais les difficultés étaient grandes pour établir un
chemin de halage et réguler le cours du fleuve parsemé de hauts fonds et coulant entre d'énormes rochers taillés à pic et découragèrent plus d'un ingénieur de l'
Ancien Régime. Au début du
XIXe, alors que les périodes troublées de la Révolution et de l'Empire laissaient place à une ère plus propice aux affaires, que les techniques rendaient les projets plus réalistes, M. Becquey, directeur général des Ponts et chaussées, présenta un rapport complet devant les membres de la Société d'agriculture et de commerce de Caen, le 16 août 1820. Il reprenait les anciens projets et se proposait d'aller au-delà, en reliant l'Orne au bassin de la
Loire. Cet éminent personnage dressait le tableau de deux canaux susceptibles de mettre en communication les deux bassins hydrographiques :
- Un canal de l'Orne à la Mayenne, établissant une communication entre Caen et Angers, en passant par le Pont-d'Ouilly, Domfront, Mayenne et Laval. Cet ouvrage aurait eu une longueur de 160 kilomètres et coûté 10 945 000 francs, il aurait pris son origine à Caen, où l'Orne est navigable, et aurait abouti à Laval, où la Mayenne commence à l'être. La dépense énoncée comprenait les aménagements à réaliser sur l'Orne, de Caen à la mer, et sur la Mayenne, de Laval à la Loire.
- Le canal d'Alençon, ou jonction de la Sarthe à l'Orne, depuis Le Mans sur la Sarthe, jusqu'à Pont-d'Ouilly, en passant par Alençon et Argentan. La longueur du trajet de cette variante était voisine du projet précédent, environ 161 kilomètres mais la dépense moindre : 8 500 000 francs, selon des conditions identiques.
Ces deux propositions suscitèrent l'intérêt, mais la nécessité de faire un choix entre les deux tracés, le coût élevé des deux variantes retardèrent la mise en oeuvre des travaux; l'arrivée du chemin de fer mit un terme définitif à cet ambitieux projet de liaison fluviale.
Environnement: l'estuaire de l'Orne
L'estuaire de l'Orne, dont une large zone a été acquise par le Conservatoire du littoral entre 1984 et 2003, constitue un milieu naturel exceptionnel car remodelé en permanence par les forces naturelles, mais il s'agit également d'un espace menacé par les activités humaines: canalisation de l'Orne, aménagement de l'avant-port d'
Ouistreham, développement touristique de Merville-Franceville-Plage, ouvrages militaires (site du débarquement de 1944). Pourtant le contact du fleuve et de la mer a multiplié les milieux et paysages (
cordons dunaires,
vasières,
marais saumâtres, prairies humides,
herbus,
roselières) favorisant la diversité de la flore et de la faune.
L'estuaire présente un très riche patrimoine ornithologique avec plus de 160 espèces recensées, qu'il s'agisse d'oiseaux sédentaires ou migrateurs, aquatiques ou marins. Parmi les espèces du large sont représentés le Goéland, la Macreuse noire, le Grand Cormoran, l'eider à duvet. La zone aquatique est occupée par le Courlis cendré, le Grèbe huppé, le Chevalier gambette, l'Huîtrier pie ou encore le Pluvier argenté. Des espèces remarquables nichent dans ce riche sanctuaire écologique comme le Hibou moyen-duc, le Bruant des neiges, la mésange à moustaches, l'Alouette hausse-col et le Martin-pêcheur.
La diversité de la flore est tout aussi grande. Plus de 280 espèces végétales ont été dénombrées (auxquelles il convient d'ajouter quelques 400 espèces de champignons ) dont certaines sont très rares en Normandie comme l'ail maraîcher, le muscari à toupet, la dame de onze heures. D'autres plus communes bénéficient d'une protection telles l'élyme des sables appelée également seigle de mer, l'Aster maritime, l'Argousier ou encore l'obione et la Salicorne.
Départements et principales villes traversés
Annexes
Bibliographie
- F. Dutour, I. de Koninck, L. le Roc'h Morgere, De Caen à la mer, histoire d’un canal, Archives départementales, Caen, 1995.
- Yves Petit-Berghem, Géographie historique d’un espace côtier:l’exemple de la basse vallée de l’Orne (Basse-Normandie), Mappemonde, n° 80, 2005. (Lire en ligne)
- Jacques Tesnière, L'estuaire de l'Orne, Conservatoire du littoral, Actes Sud, 1999 (ISBN 2742721789).
- Père Lange, Mémoire contenant quelques éclaircissements sur les différents projets qui ont paru pour la navigation supérieure et inférieure de la rivière d'Orne, imprimerie de Bonneserre, Caen, 1821. (Lire en ligne)
Liens externes
Notes et références
..