Paris-Soir a été un grand
Journal quotidien parisien de 1923-1944. Son premier numéro est sorti le 4 octobre 1923. Une édition de dimanche,
Paris-Soir dimanche a été publié du 22 décembre 1935 au 16 septembre 1939. Son numéro
ISSN est 1256-0421.
Paris-Soir dans la Seconde Guerre mondiale
Après le 11 juin 1940, et l'occupation allemande, son éditeur,
Jean Prouvost, a continué sa publication en zone non-occupée, à
Clermont-Ferrand, à
Lyon, à
Marseille, et à
Vichy, tandis qu'à Paris, il est publié sous contrôle allemand du 22 juin 1940 au 17 août 1944. Durant cette période, les critiques allemandes à l'égard du journal furent virulentes. Ainsi, Jean Prouvost est décrit le 17 janvier
1941 comme « le plus sacré menteur, la fripouille la plus dégoûtante, le salopard le plus immonde, le criminel le plus infâme, la mentalité la plus excrémentielle, la fleur de cloaque la plus purulente Et nous nous maintenons ici dans les termes les délicats de la décence la plus respectueuse » (
Au Pilori). Le climat de l'époque n'est en tout cas pas à l'apaisement.
La fuite
Le repli du journal avait été étudié avant la rupture du front, en mai
1940, vers
Nantes. Le repli de la presse parisienne est ordonné le 10 juin, et
Paris-Soir est évacué, après sa dernière édition le 11, à 15h30. Toutes la presse fait de même, à l'exception du Matin. L'édition de Nantes paraît jusqu'au 18, puis disparaît devant les Allemands. Nantes étant menacée dès le 11, la direction est allée directement vers Clermont-Ferrand. Là, une édition paraît du 10 au 17 juin. Elle est installée dans les locaux du
Moniteur, qui appartiennent à
Pierre Laval. Le 17, la rédaction reçoit Kessel, alors correspondant de guerre, qui parle d'armistice. Pierre Laval, qui ne fait pas encore parti du gouvernement, appelle son ami le maire de
Bordeaux et confirme. La rédaction accompagnée de Pierre Laval part pour Bordeaux.
Avec les nouvelles de l'armistice, certains veulent cesser l'activité, d'autres résister, ou encore collaborer. Laval y prépare la chute de Paul Reynaud, et l'armistice. Le 19 juin, les négociations d'armistice démarrent, et Bordeaux est bombardée. Le 25 juin, est déclaré l'armistice. Le 29, Bordeaux est occupée, Paris-Soir, où ce qu'il en reste, part vers la zone libre. La rédaction principale va à Lyon, et à Marseille et Toulouse sont publiés deux éditions. Le 12 juillet, Prouvost rejoint Lyon, et assure la direction du journal : un quotidien et deux hebdomadaires, Sept Jours et Marie-Claire.
La publication de Paris
Les nazis, installés dans la capitale, vont très vite réquisitionner le journal classé d'« intérêt public », pour des raisons évidentes de tirage (c'est le plus gros à l'époque). On dépêche le lieutenant Weber, Allemand francophone, marié à une Française. Il va diriger la presse française. Il entre dans l'immeuble parisien de la rédaction rue du Louvre, et ne trouve qu'un liftier alsacien, nommé Schiesslé. Celui-ci est aussitôt nommé directeur général, et voit sa paye triplée, pour justifier la spoliation.
Paris-Soir paraît dès le 22 juin, avec des rédacteurs embauchés à la va-vite. Un peu plus tard, les écrivains
Georges Claude,
Pierre Hamp,
Henri Cochet écrivent des articles, avant de se rendre compte que le journal n'est plus ce qu'il était.
La Propaganda Staffel fournit en effet des communiqués de (dés)informations. La définition du journal est : « Vivant journal d'information réalisé par une équipe 100% française ». Mais, le tirage baisse inexorablement devant les opinions pro-allemandes affichées, de 970 000 en novembre 1940, à 300 000 en 1942.
Un des problèmes était celui de la légalité, face à une rédaction toujours vivante à Lyon. On fait alors apparaître la société éditrice SAPEM, du même nom que celle en zone libre, avec le nom de Jean Prouvost, pour accentuer l'illusion. On ne cesse de contraindre la seconde à fusionner avec la première.
L’affrontement Paris-Lyon
Dés 1940, des administrateurs, le directeur, Jean Prouvost, protestent contre la spoliation. A Paris, après le directeur Schiesslé, se succèdent un imprimeur, puis le fils d'un conseiller municipal opportuniste. Un bâtiment échappe à l'occupation, la Maison de Marie-Claire. L'administrateur présent se charge de renseigner la rédaction lyonnaise, et devient vite une plaque tournante de la résistance, avec un agent de liaison, des renseignements pour le
maquis. Des passages en Suisse et en Espagne sont organisés. Le réseau suit l'organisation du journal, qui rayonne de Lyon. En février 1941, l'administrateur de la SAPEM parisienne tente de prendre possession du local. On lui répond que cela ne sera possible que par la force, la tentative ne va pas plus loin. Plus subtilement, on fait payer la SAPEM lyonnaise, par un vieux procès en appel avec une société d'édition. On y convoque les deux entreprises éditrice. Les Lyonnais refusent de venir, pour ne pas avoir à reconnaître
de facto les droits des Allemands, et sont contraints à payer 25 millions de francs. L'administration fiscale fait ensuite pression pour le paiement d'arriérés, chose impossible avec la spoliation immobilière. La société parisienne propose aussitôt de payer ceux-ci, en échange de la reconnaissance de ses droits. Les Lyonnais refusent, et payent à nouveau.
La censure en zone libre
En plus de cet affrontement, le
Paris-Soir lyonnais doit composer avec la vie en zone libre. Au début de la guerre, la liberté de la presse y est encore respectée.
Paris-Soir peut encore titrer sur les entrevues anglo-américaines. Jean Prouvost affiche sa volonté de faire connaître la vérité, de subsister pour contrer le
Paris-Soir allemand, et pour faire vivre les collaborateurs. En février
1941,
Paul Marion devient secrétaire adjoint à la présidence du Conseil pour l'Information, puis en août
1941, secrétaire général de l'Information, pour finir secrétaire d'État à l'Information en avril
1942. C'est un ancien militant communiste, habitué de la censure et de la propagande, un fasciste déclaré. Il dirige la presse française de
1941 à
1944, lui donne des
directives, la punit le cas échéant.
Paris-Soir répond par la « guerre des titres » : on agrandit le plus possible les titres des informations sportives, au détriment des informations officielles. On camoufle de même certains textes émanant du gouvernement. Les tensions et conflits sont nombreux. Le 11 novembre 1942, la rédaction apprend que les Allemands entrent en zone libre. Un placard est distribué, annonçant le sabordage de
Paris-Soir.
Pierre Laval ministre de vichy, furieux devant cette insoumission à la censure, exige alors la publication du journal, ou la déportation des 300 employés. Le journal reparaît alors, pour éviter la reprise par une équipe vichyssoise, avec pour objectif de se faire interdire le plus rapidement possible.
La résistance
La guerre des titres est alors exacerbée, ceux-ci passant du simple au quadruple selon les informations, et le tirage est parfois baissé spectaculairement lors de mauvaises nouvelles pour les Alliés. Le 25 mai
1943, Vichy réagit. Il ordonne à la rédaction des titres grossis. Mais
Paris-Soir s'entête et recommence dès le lendemain, puis se fait interdire. Pour protéger le titre, une édition confidentielle est montée à
Toulouse. La rédaction est au chômage, mais va chercher à se faire entendre.
Elle va travailler discrètement avec des journaux locaux, en préparant des éditions spéciales, favorables aux Alliés, produites dans la Résistance. De plus, la direction protège tous ses salariés contre le STO, en les envoyant dans le maquis, en Espagne, ou en Suisse. On produit des documents de propagande, avec l'aide d'Henri Lumière. Les voitures de Paris-Soir ravitaillent le maquis, en vêtement, renseignements. En avril 1944, Sept Jours se saborde.
La Libération
Dès les premières nouvelles du débarquement allié, la rédaction revient clandestinement vers Paris. En juillet
1944, toute la direction est présente. Le 1
er août cesse toute parution. Jean Prouvost échappe à une prise d'otage. Avant la fin des combats dans Paris, le 20 août, des journalistes résistants accompagnés de Forces françaises de l'intérieur occupent l'immeuble de
Paris-Soir, munis d'ordres de réquisition. Aussitôt, des journaux pro-résistants paraissent :
Le Populaire,
Franc-Tireur,
Combat,
Le Parisien Libéré… L'immeuble de
Paris-Soir est occupé par
Ce soir,
Libération et
Front National. La direction du journal propriétaire est écartée, et ses dirigeants sont arrêtés par les FFI. A Lyon, la rédaction veut être le premier journal libre à paraître, mais les FTP envahissent les locaux pour faire paraître
Le Patriote. Jean Prouvost se cache pour éviter l'arrestation. Les archives de
Paris-Soir, montées à Paris, réussissent à être sauvées. Cette ultime spoliation marque la fin du grand journal de l'
Entre-deux-guerres.
Bibliographie