Sur Incises est une oeuvre de
Pierre Boulez pour trois
pianos, trois
harpes, et trois percussions-claviers, composée entre 1996 et 1998.
Elle est dédiée à Paul Sacher, à l'occasion de son quatre-vingt-dixième anniversaire.
Il s'agit d'un commentaire sur une courte pièce pour piano de 1994 nommée Incises.
Elle se compose de deux "Moments", le premier de quatorze minutes, le second de vingt-trois minutes environ.
Boulez de la sorte décompose spectralement par le canevas harpes/percussions la sonorité des 3 pianos. Le chiffre 3 semble avoir été choisi comme compromis entre les deux pianos de la sonate pour deux pianos et percussion de Béla Bartók et les 4 pianos des "Noces" de Stravinski. De plus cette combinatoire permet une "latéralisation" des échanges pianistiques : ceux-ci confinent à la joute virtuosissime.
Le son voyage entre les trois groupes de trois instrumentistes (menés chacun par un piano leader accompagné d'une harpe et d'un percussionniste).
L'oeuvre de départ, "incises "pour piano seul, est considérablement éclatée. Le moment I s'articule en une vaste introduction (pulvérisant le matériau thématique) et d'une sorte d'exposition amplifaint légèrement l'oeuvre initiale "incises" avec une férocité rythmique rappelant les deux premières sonates de cinquante ans antérieures.
Le moment deux directement enchainé (par un sas faisant la part belle aux "steel drums" pour la première fois utilisé par Boulez) devient une sorte de commentaire en variations continues menant à un large "climax" auquel succède une cadence disloquant les groupes et le matériau : Boulez a décidé après coup (la création initiale d'Édimbourg) de laisser non dirigée cette séquence de fin (le chef baissant spectaculairement les bras et laissant le flux musical doucement s'étioler).
Quoique parfaitement circonscrite dans l'espace-temps compositionnel boulézien (1996-98 après l'original de 1994), l'oeuvre demeure ouverte, le maître se réservant la possibilité de développer ce "work in progress" dans le sens de la grande trajectoire "wagnérienne" ou "mahlérienne" le moment deux (un peu à la manière de dérive II, amplifiée dans son ajout de 2006 d'un long, large et émouvant mouvement lent.)