Tirynthe est une cité cyclopéenne de la civilisation mycénienne (1450-1250). Construite dans la plaine de l'Argolide, elle était autrefois entourée de murailles massives et imposantes. Les premiers établissements de ce site remontent au
IIIe millénaire avant notre ère, à la fin du
Néolithique. La cité développée présente durant la Protohistoire des caractéristiques architecturales spéciales et peu communes pour l'époque. Elle se place ensuite dans la lignée des cités mycéniennes.
Géographie
Localisation
Le site est dans le
Péloponnèse, sur la plaine d'argolide. Au Sud-Est d'
Argos et au Nord-Est de
Nauplie, Tirynthe se situe entre le golfe d'
Argolide et l'Isthme de
Corinthe.
Caractéristiques de la région
La région connait un climat méditerranéen de type continental. La végétation est le maquis et on y cultive des céréales, blé, orge, des vignes, oliviers et plantes aromatiques. C'est une région calcaire avec des ensembles de collines. Le calcaire est bénéfique pour l'agriculture car il absorbe l'eau et permet une meilleure décomposition des éléments en nutriments favorables aux plantes. Les plaines du bord de mer sont fertiles. Sur une longue colline, à 1500 m de la mer se dressait le palais-forteresse de Tirynthe.
Histoire
Construction légendaire
Elle aurait été construite par Praetus, frère d'Acrisius. Selon la légende, il aurait fait venir sept cyclopes de
Lycie pour bâtir la cité. Le fondateur en aurait été le héros éponyme Tiryns, fils d'
Argus aux cent yeux. Praetus donna le palais à
Persée qui le gouverna avec son épouse Andromède. Leur fils
Nestor aurait pris la suite, puis
Amphitryon, père d'
Hercule et le demi-dieu lui même y fut élevé. Tirynthe ferait partie de l'empire d'
Agamemnon. Cet empire regroupait les villes de
Mycènes, de Tirynthe et d'Argos. Les habitants de ces villes étaient les Mycéniens. Ce terme désigne les habitants de tout l'empire d'Agamemnon et pas seulement les habitants de Mycènes.
Le premier peuple à s'établir sur le site serai les Pélasges. Les traces retrouvées de ce peuple datent du .
Préhistoire et Protohistoire
Au
IIIe millénaire avant notre ère, vers la fin du Néolithique, Tirynthe voit s'établir de manière permanente un campement. Des petites barques font du cabotage et ce sont des bateaux de haut bord qui font les longues traversées dans la
mer Egée.
A l'époque du Bronze ancien, sur l'emplacement même du futur palais de l'époque mycénienne, on a partiellement dégagé les ruines d'un édifice circulaire de près de 28 m de diamètre, aux murs massifs dont la couverture a dû poser de graves problèmes techniques : son utilisation et le détail même de son architecture restent obscures. Les Pélasges seraient le premier groupe ethnique à s'être installé dans la région. Venus vers 2600 avant notre ère, ils seraient passés d'Asie en Crète avant de se développer dans toute la mer Egée.
Période Mycénienne
La cité se trouvait au coeur de la civilisation mycénienne. Les Mycéniens feraient partie du groupe ethnique des
Achéens qui refoulérent les Pélasges vers 1900 av. J.-C. La fondation du palais se situe entre
-1400 et
-1200, periode appelée minoen récent. Le commerce progressa lentement. La Mer Egée grouillait de pirates, parmis lesquels se trouvaient entre autre les Mycéniens. On a retrouvé des vases d'artistes crétois dépeignant les exploits maritimes de piraterie des rois de Tirynthe. C'est pour se protéger de leur confrères pirates que la ville n'est pas directement construite sur le bord de la mer. Elle est assez loin de la mer pour éviter une attaque, mais assez proche pour avoir accès à leurs propres navires. Bâtie sur la route qui mène du golfe de l'Argolide à l'
Isthme de Corinthe, Tirynthe était particulièrement bien placée pour percevoir un droit de péage sur les marchandises en transit et, à l'occasion, faire un raid fructueux.
Les détails de l'organisation de la société mycénienne restent très obscurs. Le peu de traces écrites retrouvées ne permet pas d'avoir une description précise de cette société ancienne. Les tablettes en argile trouvées à Mycénes sont en grande partie des documents comptables et ne décrivent pas la vie quotidienne des Mycéniens. Cependant, elles nous laissent apercevoir un système centralisé. C'est pourquoi des hypothèses sont formulées.
Les Mycéniens étaient un peuple guerrier, comme le prouvent les structures défensives impressionnantes de leurs villes. Le maitre de la cité, le wanax (le roi), avait un rôle militaire, juridique et religieux. Il était secondé par le lewagetas, le chef de l'armée. Le roi s'entourait de deux grandes classes, les telestai, les propriétaires fonciers, et les equetai, les guerriers.
Le royaume se divise en districts, dirigé par koreter et prokoreter (gouverneur et sous-gouverneur). C'est le damokoros qui régissait les communes.
Hors du palais, le demos, le peuple, occupait différents métiers : paysans, commerçants ou artisans. L'artisanat se trouvait réuni au palais. La division du travail était très complexe. Les artisans pratiquaient plusieurs activités. Les artisanats tels que le textile, le bronze, la parfumerie ou la poterie étaient très florissants.
Il semblerait que les commerçants exportaient de l'huile et du textile. Grace aux tablettes retrouvées dans ces régions, nous savons que des échanges ont été fait avec l'Egypte, la Sicile, l'Asie mineure et les îles de la mer Egée.
En ce qui concerne l'agriculture, les paysans cultivaient des céréales, des oliviers, des vignes. L'élevage se tournait plus vers les ovins, quoi que les bovins et les porcins aient été prouvés mais en moindre quantité.
L'apogée de Tirynthe et du monde mycénien se situe vers le XIIIe siècle av. J.-C.. L'histoire d'Agamemnon réunissant des rois achéens pour détruire Troie est la traduction épique de l'hégémonie mycénienne. Les fouilles du site de Troie ont permis de retrouver la Troie de Priam et de fixer sa destruction vers 1250 av. J.-C., à l'âge d'or de la civilisation mycénienne. Cependant, la richesse et la prospérité ne durent pas longtemps. La fin du XIIIe siècle est marquée par la destruction des principaux sites mycéniens, Mycènes, Tirynthe et Pylos. Les palais s'écroulent en flammes.
Les doriens qui se sont installés en Hellade ont longtemps étés tenus pour responsable de la chute du monde mycénien. Mais en réalité, ce qui avait fait la force et la richesse des citées comme Tirynthe avait disparu depuis longtemps.
Architecture et urbanisme
Les palais mycéniens comme celui de Tirynthe présentent certaines caractéristiques récurrentes: les palais sont construits sur une acropole, à l'interieur d'une forteresse. Les énormes murs qui les entourent datent du XIIIe siècle av. J.-C..
L'enceinte
La cité est entourée d'une immense muraille faite de gros blocs de pierres.
Une rampe mène à une unique porte. Les murs mesurent entre 7.5m et 15 m de hauteur. Ils sont constitués d'énormes blocs, non travaillés ou sommairement équaris et pesant souvent plusieurs tonnes. Les murailles peuvent atteindre jusqu'à 17 m de large. A certains endroits elles sont tellement épaisses qu'elles sont percées de galeries recouvertes par d'immenses dalles de pierres horizontales(1m80 de long, 90 cm de large, certaines sont encore en place ). Contigües aux galeries, on trouve aussi des chambres-magasins dont la magnifique voute en encorbellement montre la puissance de la construction. Dans les murailles se cache un escalier qui mène d'un bastion en haut de l'acropole à un passage au bas des murs. Non loin de là se trouve un puits C'était probablement un passage prévu en cas de siège et de necessité de fuite.
Palais
L'entrée était celle d'un château fort. Une porte à deux battants s'ouvrait dans un rentrant de la muraille, facile à défendre. A l'interieur de l'enceinte, une entrée, qui a servi de modèle à beaucoup d'acropole, s'ouvre sur une vaste cour pavée. Entourée de colonnades et d'une série de chambres regroupées autour du
mégaron, ou hall de reception, elle mesure environ 120m². Sur un pavement de ciment peint, se dressent quatre colonnes supportant un plafond et entourant le foyer. Pour la premiere fois se voit ici un des traits caractérisiques de l'architecture grecque, à savoir la séparation de l'appartement des femmes, ou
gynécée, du logement des hommes. La chambre du roi et celle de la reine étaient contigües mais d'aprés les constructions, il n'existait aucun moyen de communciation directe. Toutes les salles étaient blanchies à la chaux et les murs ornés de fresques. Seul le plan, les bases des colonnes et les proportions des murailles ont put étre reconnus. Le toit était formé de tuiles et de plaques schisteuses. Le palais massif est bâtis sur le modèle de Mycénes.
Au centre du plan ci-contre, prés du propylon, on trouve les traces d'un autel dont les fondations sont préhistoriques. Cependant, il a été refait plusieur fois, ce qui prouve qu'il était encore en usage à l'époque historique.
Urbanisme
Au pied de la colline on a pu trouver des restes de maison en brique ou en pierre et quelques débris de céramique archaïque. Les maisons semblent s'être construites dans l'enceinte, sinon collées aux murailles. Le palais est dessiné et décoré à la mode minoenne. Les galeries des murailles comprennent des voutes en ogive.
Art et culture
Depuis le Néolithique, chaque ville est en relation avec le reste du monde égeen et les échanges culturels et artistiques accompagnent les échanges commerciaux. Tirynthe se trouve au coeur de ce qu'Evans appelait l'helladique récent, appelé aussi mycénien, de la culture continentale. La tradition grecque veut que les Pélasges aient appris l'alphabet des marchands
phéniciens. On a trouvé à Tirynthe quelques jarres comportants des signes incompréhensibles, mais aucune tablette ni inscription. Sans doute, comme les Crétois, les Mycénniens utilisèrent des matières périssables pour écrire et de ce fait, nous n'en n'avons aucune trace. L' art est beaucoup influencé par les Crétois. Puis, lorsque l'art crétois entra dans sa décadence, la peinture demeura très florissante. On trouve à Tirynthe une des plus belles fresques de cette époque, la chasse au sanglier.
Description: l'animal et les fleurs sont de pure convention; les chiens, de couleur rose et tachetés de rouge, de noir et de bleu; l'arrière train de la bête poursuivie est tellement étiré qu'il fait songer plutôt à la longue jambe d'une jeune femme perchée sur de hauts talons; néanmoins la scène reste pleine de vie; on sent que le sanglier est affolé, les chiens volent litteralement et l'homme, de tous les êtres vivants le plus cruel et le plus sentimental à la fois, guette sa proie, l'épieu à la main. On peut , d'après ces quelques exemples, avoir une idée de la vie quotidienne des Mycéniens, juger de l'orgueilleuse beauté de leur femmes et de la décoration de leurs palais.
Les plus beaux objets en métal que nous ai laissé Tirynthe sont deux dagues de bronze serties d'ambre et d'or brunie, sur lesquelles l'artiste a representé en gravure des chats sauvages poursuivant des canards, des lions poursuivant des léopards, des combats de guerriers.
Actualités archéologiques du site
L'acropole, qui était une forteresse et une résidence royale a été fouillée par
Schliemann. Il découvre en 1884-1885 les ruines du grand palais de Tirynthe, qui sont encore visibles aujourd'hui. Lors du début des fouilles, une église se trouvait sur le coté Sud de le cour et reposait sur des fondations mycéniennes. Le site est classé à l'UNESCO pour quatre critères:
- les murailles de Tirynthe sont des exemples du génie créateur de l'homme
- la civilisation mycénienne a eu un profond impact sur le développement de l'architecture grecque classique, et donc sur l'architecture contemporaine.
- Tirynthe représente l'apogée de la civilisation mycénienne, qui a posé les bases des cultures européennes ultérieures.
- Tirynthe, comme Mycénes, est indéniablement liée aux épopées homériques de l'Iliade et l'Odyssée, dont l'influence perdure dans la litterature européenne et les arts depuis trois millénaires.
La plus grande part du matériel découvert à Tirynthe se trouve aujourd'hui au musée d'Athènes, comme par exemple la fresque de la chasse au sanglier, cité plus haut.
Bibliographie
Ouvrages sur l'histoire grecque: - W. Durant, Histoire de la civilisation tome IV, la vie de la Grèce tome I, Edition Rencontre, 1962
Ouvrages sur Tirynthe:
- N. Papahatzis, Tirynthe, Ed. Clio, 1986
Liens externes