Cet article décrit les phénomènes liés à
la violence et à la brutalité policière en les replaçant dans leur contexte.
Définition
La loi autorise la
police à utiliser certains formes de
Violence. La
violence policière dont il s'agit ici est une violence illégale ou
illégitime. Elle est perpétrée par un policier en fonction.
- Le caractère abusif est essentiel. Selon la définition célèbre de Max Weber, l'État disposerait du "monopole de la violence légitime", et il serait la seule source de légitimité pour quiconque utilise la violence. En l'occurrence, celle-ci est exercée dans les États modernes par la police et l'armée. Ces deux institutions ont le droit, en théorie dans le cadre de la loi et plus pragmatiquement si le gouvernement l'exige (dans divers cas de délinquance, insoumission mais aussi de Manifestation, de crise Insurrectionelle, d'émeutes, voire de Guerre civile), d'exercer la violence sur la population afin de rétablir l'ordre. Par conséquent, l'abus de violences policières désigne l'exercice de la violence en dehors du cadre prévu par les règles (loi, procédures, décisions de justices). La notion s'étend donc de cas individuels isolés à des mouvements collectifs. Individus ou groupes soumis aux violences policières peuvent contester la légitimité de la violence policière, que ce soit en dénonçant son éventuelle illégalité ou encore la légitimité des règles la justifiant. Dès lors que cette contestation prend de l'ampleur, la situation s'oriente de plus en plus vers une guerre civile. Dans ce contexte, le choix des mots est une arme idéologique de premier ordre, ceux qui sont considérés comme des terroristes, des conspirateurs, des espions et agent à la solde d'une puissance étrangère ou encore des bandes de délinquants organisés d'un côté se désigneront plutôt comme des dissidents, résistants, militants, libérateurs...
- La relation avec l'activité policière, qu'elle soit circonstancielle ou causale, est également caractéristique ; une violence perpétrée par un policier en-dehors du service et sans l'usage des armes ou prérogatives que son emploi confère n'est pas considérée comme violence policière.
- Enfin, il convient de noter que la violence policière n'est pas la seule forme de violence d'État qui soit abusive : il existe des Abus de droit de la part des administrations, des exactions au sein des services secrets, etc. qui revêtent un caractère de violence analogue et emploient des voies similaires.
Caractéristiques
Violence ordinaire
La violence policière peut prendre toutes les formes de la violence classique, parmi lesquelles les plus visibles sont la violence physique (coups, blessures, meurtre) ou morale (harcèlement verbal ou procédurier, harcèlement sexuel, racisme, tutoiement etc).
Les comportements violents illégitimes sont facilités par le statut et l'équipement (port d'armes, accès à des informations privées, des dispositifs d'écoute téléphonique etc) dont jouissent les agents de police dans l'exercice de leur fonction, privilèges que leur accordent les États au nom de la suprématie de l'intérêt public. Celui-ci exige en effet que les missions légitimes de police (maintien de l'ordre, arrestation d'un criminel) ne puissent être entravées. Violence légitime et illégitime vont souvent de pair; il est difficile de ne permettre que celle-ci en empêchant celle-là, quoique certains développements récents de l'arsenal répressif notamment en France aillent en ce sens avec la constitution de corps de police aux compétences restreintes comme la Police municipale et l'émergence des armes non létales. Toutefois, l'ambigüité reste de mise car le développement d'armes comme le flashball ou les armes électriques de type Taser dans les services de police est considéré à la fois comme un moyen de limiter les conséquences d'un usage légitime de la violence physique, mais aussi de favoriser le recours à la force au détriment de la négociation.
Violence de situation
Il existe également des formes de violences spécifiques de l'autorité spéciale dont la police est revêtue, qui ont trait à l'impossibilité (en droit comme en fait) de résister aux agissements des forces de police. Cette impossibilité est de droit commun dans de nombreux États, toujours en raison de l'argument de suprématie de l'intérêt public; ainsi, les policiers assermentés ont voix prépondérante en cas de conflits de témoignages. Leur responsabilité personnelle peut alors être exonérée quand ils usent de violence (même inappropriée à la situation) dans l'exercice de leurs fonctions en raison de la difficulté à prouver en pratique que l'usage de la force était inapproprié. Amnesty International pointe ainsi les difficultés du gouvernement et de la justice italiens à faire la lumière sur les responsabilités de la violente répression des émeutes anti-G8 de Gênes de 2001 et à prévenir d'autres violences du même type.
La violence policière en France
Amnesty International dénonce depuis de nombreuses années un niveau inacceptable de violences policières sur le sol français, que ce soit dans les commissariats ou sur le terrain : interrogatoires musclés, mauvais traitements en garde à vue, sévices corporels voire sexuels, humiliations employées comme un moyen
pénal accessoire (la pratique se nomme «attendrir la viande»).
Liste de faits de violence policière sur le sol français
Classés par ordre chronologiquePour plus de détails, voir les notices qui sont consacrées à chacune de ces affaires.
- massacre des Algériens à Paris, 1961, entre 32 et plus de 300 morts.
- « Ratonnade » de la Goutte d'Or, Paris, 1961, 127 blessés graves
- Manifestation pacifiste de Charonne en 1962, 9 morts communistes.
- Juin 1968: Gilles Tautin se noie dans la Seine alors qu'il est poursuivi par la police.
- Paris, 6 décembre 1986 Malik Oussekine (22 ans) est battu par des voltigeurs motocyclistes de la police et décède des suites de ses blessures.
- Nice, 25 mai 1997 (compte-rendu) — violence physique
- Affaire Selmouni contre France
- Montpellier, 28 avril 2004 : Affaire Petit et Maulpoix — violence physique sur une personne Sans domicile fixe; violence morale sur les éponymes, témoins.
- Mont-Saint-Aignan, 3 avril 2007 : Interpellation violente de deux hommes par la police près de Rouen, scène filmée par un occupant d'un immeuble voisin.
Affaire Ambrosi (1985)
Dans la nuit du 18 au 19 avril 1985, le Commissaire Gilbert Ambrosi est écroué. Il est inculpé de « coups et blessures volontaires avec préméditation à l'aide d'une arme dans l'exercice de ses fonctions »; il est suspendu de ses fonctions par l'IGPN. Il avait tabassé le 1
er décembre
1984 Karim Ramdani, un algérien, dans le commissariat d'Annonay; il avait utilisé une matraque électrique qui avait laissé des traces sur sa victime et avait été dénoncé par ses propres gardiens de la paix, choqués par ces actes de barbarie. Le Collectif d'immigrés d'Annonay a organisé une manifestation de protestation le 20 avril 1985 tandis qu'une pétition en faveur du commissaire était lancé par les commerçants. « Cet Arabe, il signait des autographes avec des lunettes noires en bombant le torse comme Elvis Presley » déclare un « boutiquier ». La veille de la manifestation, la vitrine du Dauphiné libéré qui a interviewé Karim Ramdani est cassée, des « Bravo Ambrosi » sont taggués sur les murs, et le Front national local (9,12% aux élections cantonales sur la ville d'Annonay) considère l'incarcération du Commissaire Ambrosi comme inacceptable. Dans la nuit du 20 au 21 mai 1985, la résidence secondaire de Gilbert Ambrosi est détruite par une explosion. Le 20 décembre 1985, Gilbert Ambrosi est exclu de la Police et condamné à 30 mois de prison (dont deux mois fermes) par le Tribunal de Clermont-Ferrand; il est aussi condamné à verser 20 000 francs français de l'époque à la victime, Karim Ramdani, et 1 000 francs français à la Ligue des Droits de l'Homme. Dans la salle, était présent le délégué local de la FPIP(syndicat de policiers). La Ligue des Droits de l'Homme avait aussi des militants présents dans la salle. L'avocat de la LDH, Maitre Fort, déclarera : « (...) je rends hommage aux policiers qui ont dénoncé le comportement honteux et abusif de leur chef ». Toutefois, le Procureur, qui avait requis deux ans de prison, dont un ferme, fait appel de la décision, qui sera jugée à nouveau devant la cour d'appel de Riom (Puy-de-Dôme). La peine de 30 mois de prison dont deux fermes est confirmée en appel le 27 février 1986.
L'ancien commissaire de police Gilbert Ambrosi, également juge de proximité au tribunal d'instance de Menton, a été « dispensé de toute activité professionnelle » pour violences policières mercredi 1er mars 2006 par le président du Tribunal de grande instance de Nice, Jean-Michel Hayat. « Je découvre la situation et j'ai décidé de dispenser Gilbert Ambrosi de toute activité professionnelle car je ne souhaite pas qu'il ait un contact avec un justiciable aussi bien en matière civile que pénale », a déclaré le président du Tribunal de grande instance de Nice. La décision a été confirmée par le conseil superieure de la magistrature. Elle intervient après la publication par le Canard Enchaîné du 1er mars 2006 d'un article relatif au passé de Gilbert Ambrosi. Selon le journal, l'ancien commissaire avait torturé plusieurs heures un jeune cambrioleur qui refusait d'avouer son forfait en décembre 1984.
Affaire Aveline (1988)
Christian Dovéro, un jeune homme de 26 ans inconnu des services de police, décède au début du mois de février 1988 d'une balle dans la tête provenant de l'arme (un 357 magnum) d'un policier travaillant sur un trafic de voitures volées; le jeune Christian Dovéro, à qui le père voulait offrir une voiture, avait observé avec envie une Lancia avant de remonter dans le taxi de son père qui attendait là la mère de la victime; les policiers se sont alors précipité sur Christian Dovéro l'arme au poing et un coup serait parti dans la panique générale, selon le témoignage des policiers. Le policier auteur du coup de feu, Jean-Pierre Aveline, qui a le même âge que la victime, n'est ni inculpé, ni présenté au Parquet. Les chauffeurs de taxi, qui avaient été alertés par le père de la victime (qui avait cru à une agression lorsqu'il avait vu les policiers en civil avec leurs armes braquées sur lui et son fils), sont furieux et envisagent une action de protestation. De leur côté, les magistrats du syndicat de la Magistrature « s'attendaient à l'ouverture d'une information pour homicide involontaire. La demande du cabinet du garde des Sceaux a été différente. En ouvrant l'information judiciaire pour recherche des causes de la mort, il n'y a pas d'inculpation.
Le policier ne peut pas se défendre et cela exclut pour la famille la possibilité de se constituer partie civile pour entrer dans la procédure avec une défense. ». Le magistrat du Parquet en charge du dossier menace de démissionner. Le 5 février 1988, les parents de la victime déposent plainte avec constitution de partie civile pour « homicide volontaire ». Le 5 février 1988 au soir, Jean-Pierre Aveline est finalement incarcéré à la prison des Beaumettes sous l'inculpation de coups et blessures volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner. Le journal
Libération rend compte des différentes versions qu'il peut y avoir et de l'affaire, et des divergences de réactions entre les magistrats, qui choisissent une application stricte de la loi, et les politiques, qui choisissent de ne pas donner une mauvaise image de la police. Le 10 février 1988, le syndicat CGT-Police des Bouches-du-Rhône demandera la dissolution des brigades de surveillance de secteurs (BSS) auxquelles appartenait Jean-Pierre Aveline. Le SNAPC (Syndicat national autonome des policiers en civil, principale organisation des inspecteurs) insistent sur le fait que les policiers de la BSS ne sont pas assez formés et qu'ils agissent en toute illégalité. « Avez-vous jamais vu une infirmière remplacer un chirurgien faute d'effectifs ? On a créé le BSS uniquement pour grossir les statitstiques d'interpellation » lance M. Maldonado, responsable Marseillais du SNAPC. Lors du procès de Jean-Pierre Aveline aux Assises d'Aix-en-provence en juin 1989, les policiers de la BSS feront front pour soutenir leur collègue. Jean-Pierre Aveline est finalement condamné à deux ans de prison avec sursis pour le meurtre de Christian Dovéro.
La violence policière aux États-Unis
Aux États-Unis, les affaires présentées comme des cas de violence policière sont souvent mises en relation avec des problèmes de discrimination à l'égard de communautés. Toutefois il est maladroit de généraliser ces affaires étant donné la multiplicité des forces de police américaines.
Les groupes pour lesquels cette discrimination est régulièrement évoquée sont:
- les afro-américains et les hispaniques.
- les protestataires des meetings politiques, notamment en 2004 pour les conventions nationales républicaine et démocrate.
- les manifestations de rue des chrétiens évangéliques et autres chrétiens fondamentalistes () (acception de ces termes liée à la religion aux États-Unis).
- de nombreuses actions de Grève, de protestation, et d'actes de désobéissance civile, comprenant entre autres les manifestations du mouvement altermondialiste.
Actions citoyennes
Des associations se sont fixées comme but d'oeuvrer pour modifier le comportement policier. Ces groupes opèrent le plus fréquemment en mettant le doigt sur les actions de la police au travers de tableaux de bord rédigés de manière indépendante et d'autres méthodes statistiques. Copwatch () rassemble des associations activistes qui suivent et filment les interventions des forces de l'ordre afin de prévenir le phénomène de brutalité policière. Des collectifs tels que
(en) October 22nd Coalition to Stop Police Brutality, Repression, and the Criminalization of a Generation ainsi que des associations de plaignants sur le plan juridique (la plupart du temps prenant le nom d'un individu décédé des suites de violences, ou victime d'actes de brutalité) soutiennent les victimes ou leurs proches et se joignent à leurs démarches.
Journée internationale
- Le 15 mars est la Journée internationale contre la brutalité policière
Notes et références
Voir aussi
Bibliographie
- Maurice Rajsfus, La police hors la loi, Des milliers de bavures sans ordonnances depuis 1968, Le Cherche Midi, 1996 ISBN 2-86274-466-2
- Maurice Rajsfus, Bavures : Ordre public, désordre privé, l'esprit frappeur n°103, 2001, ISBN 2-84405-172-3
- Fabien Jobard, L'usage de la force par la police, ın Traıte de la securite ınterieure, pp. 530-541, HMH, 2007 ([#]).
- Commission nationale de déontologie de la sécurité, Rapport 2003, La Documentation française, Paris, 2003, 385 pages.
- Commission nationale de déontologie de la sécurité, Rapport 2004, La Documentation française, Paris, 2004, 535 pages.
- Commission nationale de déontologie de la sécurité, Rapport 2005, La Documentation française, Paris, 2005, 503 pages.
Liens internes
- Bavure policière
- Bavure policière en France
- @ Liberté fondamentale
- Sociologie de la police
- France :
- Affaire de la station de métro Charonne
- Malik Oussekine
- Assaut de la grotte d'Ouvéa
- Mexique : Occupation militaire d'Oaxaca, effectuée par un corps de police formé avec des techniques militaires
Liens externes